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24 septembre 2012 1 24 /09 /septembre /2012 22:05

 

Le 10 juillet dernier, nous écrivions une lettre à Monsieur Michel Récipon en sa qualité de Président du Directoire de la Fondation Raoul Follereau.

Nous l'interrogions sur un certain nombre de points historiques qui méritaient quelques éclaircissements de sa part. Hélas, il n'a pas daigné nous répondre. 

En conséquence, nous rendons publique aujourd'hui non seulement la lettre en question, mais aussi une vidéo qui reprend des citations pour le moins problématiques de Raoul Follereau et/ou de son journal L'Œuvre Latine.

 

 

 

 

 

Romain Gallaud Le 10 juillet 2012 romain.gallaud@hotmail.fr Lettre ouverte à Monsieur Michel Récipon Président du Directoire de la Fondation Raoul Follereau Objet : Fondation Raoul Follereau, la contre-enquête Monsieur le Président,  Le 7 juin dernier vous nous avez informés par l’intermédiaire de votre avocat que vous considériez qu’un des nombreux articles de notre blog contenait des propos qui, selon vous, étaient de nature à porter atteinte à votre honneur et à votre considération.  Nous nous permettons de relever que notre blog existe depuis avril 2010 et que nous n’avons jamais reçu de message officiel de votre part malgré nos tentatives réitérées de contacts. Nous relevons également que vous n’avez pas jugé opportun d’attaquer en justice notre livre Fondation Raoul Follereau, la contre-enquête publié aux éditions Golias en janvier 2012 malgré le fait qu’il reprend l’ensemble des affirmations exposées sur notre blog.  Néanmoins, nous avons retiré les propos litigieux car nous souhaitons profiter de cette prise de contact pour vous adresser en retour ce courrier qui constituera, en cas de besoin, une démonstration de notre bonne foi, du sérieux de notre contre-enquête et de notre souci d’être à l’écoute des contre-arguments que vous auriez pu, éventuellement, nous communiquer.  Ainsi, notre contre-enquête nous a amenés à constater que depuis plusieurs décennies, Raoul Follereau lui- même, puis votre père, André Récipon, puis vous-même, après que ce dernier vous ait transmis les rênes du groupe Follereau, communiquez auprès du grand public un certain nombre d’informations dans le but direct ou indirect de susciter des dons, legs et autres actions bénévoles au profit de vos activités alors que, sur de nombreux points, il existe ce que nous appellerons pudiquement des divergences pour le moins problématiques entre ces informations et notre interprétation de la réalité objective des faits. Parmi tous les points susceptibles d’être évoqués, nous avons sélectionné quatre exemples qui nous paraissent caractéristiques et sur lesquels nous vous demandons de vous positionner.  Nous considérons en effet que, dans la mesure où vous bénéficiez d’un statut fiscal dérogatoire particulièrement avantageux, dans la mesure où vous sollicitez la générosité du grand public et dans la mesure où l’exercice de cette générosité exige la confiance et la transparence, les donateurs, les bénévoles et plus généralement, les contribuables français ont le droit d’obtenir une information complète, véridique et exhaustive sur votre organisation et sur les messages qu’elle diffuse. Cette information est d’autant plus nécessaire que Raoul Follereau n’a fait l’objet que d’une seule étude historique réellement circonstanciée, celle d’Etienne Thévenin, dont la dimension profondément hagiographique a été relevée par d’autres commentateurs que nous. Notre contre-enquête est donc à la fois indispensable et légitime puisqu’il n’existe face à vous aucun contre-pouvoir suffisamment établi pour vous apporter la contradiction.  Nous vous informons pour conclure que cette lettre et les réponses que vous voudrez bien y apporter, le cas échéant, seront rendues publiques par tous moyens à notre convenance après un délai que nous estimons raisonnable de fixer à soixante jours. Pour la bonne forme, veuillez noter que nous nous engageons à publier intégralement les réponses que vous nous communiquerez, sans ajout ni aucune modification, selon les règles applicables en matière de droit de réponse, à l’exception des échanges que vous qualifierez expressément de confidentiels.  Enfin, il est bien entendu que si vous nous apportiez la preuve du caractère erroné de nos affirmations, nous en tirerions immédiatement les conséquences qui s’imposent en supprimant les parties concernées.  Vous souhaitant bonne réception des présentes, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations distinguées.   Romain Gallaud  PS. 1. Pour ne pas alourdir notre propos, nous ne reprenons pas les sources qui figurent déjà sur notre blog ou dans notre livre. Néanmoins, nous les tenons à votre disposition sur simple demande. 2. Nous avons décidé de limiter cette présente lettre aux aspects historiques de notre contre-enquête. Nous réservons donc pour plus tard nos questions relatives aux aspects juridiques, comptables et fiscaux de la Fondation Raoul Follereau.  2 1. Raoul Follereau est-il réellement l’auteur du poème Un sourire Sur votre page facebook (https://www.facebook.com/FondationRaoulFollereau), en date du 27 juin 2012, vous avez publié un poème intitulé Un sourire que vous affirmez être de Raoul Follereau. Quelques jours plus tard, le 3 juillet, sur cette même page, vous diffusez une vidéo sur Youtube (http://www.youtube.com/watch?v=mjcMuyxQGaQ) qui annonce : « Encore un beau texte, écrit par Raoul Follereau (…) ».  Or, le style de ce poème ne correspond pas au genre littéraire de Raoul Follereau. Nous avons donc voulu en savoir plus. Après vérification à la Bibliothèque Nationale de France, le Livre d’Amour écrit par Raoul Follereau au début des années 1920 ne contient pas ce poème, contrairement à ce qui est parfois écrit sur internet, notamment la fiche Wikipédia sur laquelle vos équipes sont déjà intervenues. Par ailleurs, nous relevons que vous ne l’aviez pas publié dans les Œuvres Complètes de Raoul Follereau éditées en 2003. Il semblerait plutôt que ce poème ait été écrit par un inconnu américain, peut-être un certain Franck Irving Fletcher selon divers sites internet. Dale Carnegie le reproduit dès 1936 dans son best-seller How to win friends & influence people publié aux éditions Simon and Schuster sous le titre The Value of a smile at Christmas. Il est consultable sur internet dans une réédition de 1998 (http://books.google.fr/books?id=1rW-QpIAs8UC&lpg=PP1&hl=fr&pg=PP1#v=onepage&q&f=false). Or, Raoul Follereau était totalement inconnu aux États-Unis d’Amérique avant la seconde guerre mondiale, il est donc hautement improbable que ce texte ait fini, comme Dale Carnegie l’indique, dans la devanture d’un grand magasin new-yorkais au début des années 1930. Nous pensons plutôt que ce poème a été attribué à Raoul Follereau par quelques sympathisants zélés qui auraient été victimes d’une malencontreuse confusion avec les conférences Le sourire de la France que Raoul Follereau anima effectivement tout au long des années 1930 mais qui n’ont rien à voir avec ce poème.  C’est pourquoi nous vous invitons à nous indiquer l’ouvrage et sa date de publication dans lequel Raoul Follereau aurait écrit ce poème Un sourire : si cette source date d’avant 1936, la paternité de ce poème pourra éventuellement lui être attribuée. Dans le cas contraire, il faudrait en tirer les conséquences et ne plus alimenter ce qu’il conviendrait alors d’appeler une supercherie littéraire.   2. Raoul Follereau fut-il réellement éditeur de jeunes talents littéraires ?  Nous lisons dans la biographie de huit pages que vous diffusez sur votre site internet (http://www.raoul- follereau.org/images/stories/pdf/raoulfollereau.pdf) les éléments suivants : « Pensant aux « jeunes élites », il fonde la Ligue d’union latine, et, en moins de 5 ans, édite plus de 100 auteurs et permet à plus de 300 auteurs et interprètes de théâtre de se faire connaître. (…) Il veut aider des amateurs et de jeunes « professionnels », français et étrangers, à s’exprimer, à partager leur passion et à réaliser leurs rêves. Son objectif : contribuer ainsi à renforcer la paix dans le monde » (page 1) « il [Raoul Follereau] publie les autres et cherche à les faire connaître. (…) En 1927, il fonde la Ligue d’Union latine avec son organe, un journal qui s’appelle L’Œuvre latine. Certes, cette nouvelle fondation continue en un sens l’œuvre amorcée dans la Jeune Académie : on trouve dans ce journal des publications de poèmes ; il y aura aussi, à côté de ce journal, des publications de recueils de poèmes. En 5 ans, il édite 150 volumes de 100 poètes différents » (page 5). De même sur votre site internet, dans la partie intitulée Petite biographie d’un homme d’action, vous précisez : « - 1927 : il crée la Ligue de l'Union latine et la Jeune Académie : le poète, l'homme de lettres se lance dans le combat littéraire. ».  Par ces formulations, vos lecteurs sont susceptibles de croire que non seulement Raoul Follereau a exercé le métier d’éditeur, mais qu’en plus, il l’a fait dans un but désintéressé, cherchant à « contribuer à la paix dans le monde » via un « combat littéraire », aidant de jeunes inconnus « à se faire connaître », etc. Vous insistez également sur le nombre d’auteurs édités (300 auteurs, 150 volumes, etc.), mettant ainsi en avant l’ampleur de sa démarche et donc, par voie de conséquences, tout le mérite qui devrait lui revenir.  La suite de notre propos exige de rappeler ce qu’est un éditeur au sens qu’un lecteur non averti lui attribue.  La caractéristique principale d’un éditeur, tel qu’il est conçu dans l’esprit de la majorité des lecteurs, réside dans trois aspects essentiels : en premier lieu, l’auteur cède à un éditeur les droits d’exploitation de son œuvre littéraire ; en second lieu, l’auteur est rémunéré par l’éditeur sous la forme de droits d’auteur généralement proportionnels aux ventes ; en troisième lieu, c’est l’éditeur qui prend l’intégralité du risque d’exploitation commerciale du livre en avançant sur ses propres deniers les frais de conception, d’impression, de diffusion, etc.  Or, notre lecture des numéros de L’Œuvre Latine nous amène à une toute autre conclusion. En effet, nous avons retrouvé deux numéros de L’Œuvre Latine dans lesquels le modèle économique des  3 Éditions de la Jeune Académie est largement décrit (numéros d’octobre 1936 et de novembre 1938). Les termes du contrat d’édition sont clairs : c’est l’auteur qui finance sur ses propres deniers l’impression et la conception de ses ouvrages, à ses risques et périls en cas de mévente. En échange de quoi, il conserve l’intégralité de ses droits moraux et touche directement le produit des ventes. En ce qui les concerne, les Éditions de la Jeune Académie ne prennent aucun risque d’exploitation : elles se contentent de proposer divers services payants pour l’impression, la conception, la décoration, etc. des livres. Quant aux critères de sélection des ouvrages, ils s’avèrent être plus idéologiques que littéraires : « Notre maison est FRANCAISE ET LATINE. Nous n’éditons que des ouvrage d’une valeur littéraire suffisante [sic] absolument irréprochable au point de vue moral et patriotique ». Il résulte de ces documents que le contrat d’édition proposé par Raoul Follereau est un contrat dit à compte d’auteur, autrement dit un contrat d’imprimeur avec quelques services associés payants ou inclus dans le prix. Dans les faits, Raoul Follereau ne prenait aucun risque éditorial : il se faisait tout simplement commerçant-imprimeur qui vend ses services à un client-auteur.  Dans ce cadre, vos propos mentionnés ci-dessus ne reviennent-ils pas à attribuer à Raoul Follereau des mérites qu’il n’a pas ?   3. Raoul Follereau a-t-il réellement rencontré des lépreux en 1936 au cœur du désert du Sahara ?  Nous abordons ici un des piliers fondateurs du mythe de Raoul Follereau. Nous avons déjà largement exposé notre point de vue sur notre blog ainsi que dans notre livre Fondation Raoul Follereau, la contre- enquête. Nous nous contenterons donc de poser quelques questions précises à ce propos.  3.1. Vous affirmez sur de multiples supports – reprenant ainsi les allégations de Raoul Follereau en personne – que ce dernier a fait cette rencontre des lépreux alors qu’il était en Algérie pour le compte du journal argentin La Nacion qui lui avait commandé un reportage à propos de Charles de Foucauld. Si notre lecture de L’Œuvre Latine nous a effectivement confirmé que Raoul Follereau avait croisé à au moins deux reprises durant les années 1930 un certain Drago Mitre, chancelier de l’Ambassade d’Argentine à Paris et correspondant en France de ce journal, nous nous étonnons de n’avoir pas retrouvé trace de ce reportage, ni même du fait qu’il ait travaillé, ne serait-ce que comme pigiste, pour La Nacion. Pouvez-vous nous transmettre une copie de cet article et sa date de publication ? Sinon, disposez-vous d’un contrat (édition, pige, salaires ?) qui unissait Raoul Follereau au journal La Nacion ? Sinon, de quelles preuves disposez-vous pour reprendre cette allégation ?  3.2. À partir du milieu des années 1950, Raoul Follereau proclama à de très nombreuses reprises, par oral et par écrit, avoir effectué ce reportage alors qu’il venait de se marier, qu’il venait d’avoir 25 ans, qu’il venait de devenir avocat, soit, à quelques années près, entre 1925 et 1930 (voir dans notre livre toutes les sources citées). Ce n’est que longtemps après sa mort que la Fondation Raoul Follereau datera ce voyage en 1936. André Récipon lui-même fera une confusion dans ses propos introductifs des Œuvres Complètes de Raoul Follereau parlant tantôt de 1933, tantôt de 1935. Sur quel fondement vous êtes-vous reposé pour contredire ainsi Raoul Follereau et fixer la date de 1936 ?  3.3. Une autre organisation de lutte contre les lépreux, et non des moindres, l’Ordre de Malte, prétend, elle, dans ses dossiers de presse annuels sur la journée mondiale des lépreux, que c’est en 1938, dans le cadre d’une mission que lui avait confiée la branche française de l’Ordre que Raoul Follereau a été confronté pour la première fois de sa vie à la problématique des lépreux. Cela laisse supposer qu’entre Raoul Follereau (et la FRF) et l’Ordre de Malte, l’un des deux se trompe. Comment expliquez-vous cette divergence ? De quelle preuve disposez-vous pour maintenir votre affirmation ?   3.4. Même question pour la Fondation Follereau Luxembourg qui affirme de son côté que cette rencontre a eu lieu en 1935 ?  3.5. Nous avons attentivement lu les numéros de L’Œuvre Latine de 1927 à 1940 et nous étonnons de n’avoir retrouvé aucun article à propos de sa rencontre avec les lépreux alors que plus tard, Raoul Follereau et vous-même en parlerez comme étant l’épisode fondateur de toute sa vie. Bien au contraire, les écrits de Raoul Follereau démontrent qu’il ne découvre l’Afrique du Nord qu’en juin 1936. Et encore : les articles de 1936-1937 en lien avec le Sahara sont consacrés à la promotion des mouvements nationaux et coloniaux dans ce qui était à l’époque les départements français d’Algérie (les Bellat père et fils et leurs Unions latines, l’abbé Lambert et ses Amitiés latines puis son Rassemblement National, etc. : nous en reparlerons ci-dessous). Comment expliquez-vous ce paradoxe ? Dans le même sens, lorsqu’il présente pour la première fois à ses lecteurs, en 1943, la cause du village d’Adzopé, non seulement il ne parle pas de cette mystérieuse rencontre, mais pire, il aborde le sujet des lépreux non comme une finalité caritative en elle-même mais comme un moyen au service de ses activités de promotion de sa vision de la France. Ce n’est finalement que bien plus tard, au milieu des années 1950, après que sa notoriété de Vagabond de la charité ait commencé à s’installer dans le monde entier, qu’il narrera pour la première fois cet épisode de sa vie. Comment expliquez-vous le fait que Raoul Follereau ait attendu si longtemps avant de parler de cette rencontre des lépreux ?  3.6. Etienne Thévenin lui-même, l’hagiographe autorisé dont nous avons déjà parlé ci-dessus, reprend à son compte l’histoire de la rencontre des lépreux qu’il date en 1936, mais il ne nous a pas transmis à ce jour de preuve scientifiquement recevable. Il souligne par ailleurs que la vie de Raoul Follereau est très éloignée des lépreux jusqu’en 1939. Même en 1943, pour le village d’Adzopé, Etienne Thévenin soutient, et notre lecture des numéros de L’Œuvre Latine de l’époque nous le confirme, que Raoul Follereau n’a aucunement pour intention de consacrer sa vie aux lépreux. En effet, parlant du village d’Adzopé en 1943, Thévenin écrit : « Raoul Follereau s’engage dans une action très ponctuelle et limitée. (…) l’action en faveur des lépreux ne devait initialement le retenir que pendant le temps de la construction du village ». Pensez-vous qu’Etienne Thévenin se soit trompé lorsqu’il suggère que Raoul Follereau n’a réellement embrassé la cause des lépreux qu’au début des années 1950, à l’âge de presque 50 ans ? Sinon, comment conciliez-vous cette opinion avec le fait que Raoul Follereau ait prétendu le contraire tout au long de ses livres et conférences postérieurs à 1950 ?   4. Raoul Follereau a-t-il réellement consacré toute sa vie aux lépreux ? La vie de Raoul Follereau fut-elle réellement « un seul acte d’amour » ?  Suite au troisième thème exposé ci-dessus, Raoul Follereau prétend avoir consacré toute sa vie à la cause des lépreux. C’est une formulation que vous reprenez régulièrement dans vos diverses publications, interventions radio, audiovisuelles, etc. De façon plus générale, votre communication reprend régulièrement et de diverses façons la conviction selon laquelle toute la vie de Raoul Follereau aurait été exemplaire en termes de vertus, de dévouement et de désintéressement. Ce genre d’affirmation est systématique et se décline sur tous les tons. Nous en citons quelques extraits ci-après, mais ils sont en réalité innombrables : - « 1927 – 1977, cinquante années d’une vie qui fut un seul acte d’amour » - « Raoul Follereau (1903-1977) est un humaniste engagé du XXe siècle qui a consacré sa vie à lutter contre l'exclusion sous toutes ses formes. » - « La Fondation Raoul Follereau a pour objet de poursuivre l'oeuvre à laquelle Raoul Follereau a consacré toute sa vie « contre la lèpre et toutes les lèpres. » » - etc.  Une déclinaison récente de cette stratégie de communication réside dans la création d’une association afin de promouvoir la pensée et les œuvres de Raoul Follereau, notamment en portant la cause de béatification / canonisation du grand homme.  Dans la mesure où le fait d’œuvrer dans le secteur caritatif vous fait bénéficier d’une présomption de confiance, bénévoles, internautes et journalistes reprennent ces assertions diffusant à votre plus grand profit l’image d’un Raoul Follereau immaculé et vertueux. Vous alimentez bien entendu ces initiatives par vos dépenses de promotion de la pensée et l’œuvre de Raoul Follereau que vous êtes même allés jusqu’à ériger en mission sociale de la Fondation Raoul Follereau pour l’établissement de votre compte des emplois et des ressources.  Or, notre contre-enquête nous a amenés à découvrir des documents probants et circonstanciés qui tranchent avec cette vision pour le moins dithyrambique du personnage. Afin de démontrer notre propos, nous allons devoir citer quelques extraits qui illustrent une facette de Raoul Follereau sur laquelle vous vous étendez fort peu.  Force est de constater, effectivement, que Raoul Follereau pratiqua la charité d’une bien étrange façon puisqu’il consacra au moins la période 1927 – 1945 de sa vie à la défense d’idéaux ultranationalistes et à une lutte farouche contre les agents dits de « l’Anti-France » : fortement marqué par les doctrines de Charles Maurras, Raoul Follereau se fit le héraut hyperactif d’une France « immortelle », héritière d’une « civilisation latine » contre les « barbaries », termes qui regroupent dans son esprit tout ce qui n’est pas « latin » : l’esprit germain, le libéralisme anglo-saxon, les russes gangrenés par le bolchevisme, etc. En 1940, Raoul Follereau s’engage résolument aux côtés de la Révolution Nationale du Maréchal Pétain qu’il considérait être la renaissance de la « vraie » France. Ouvrons une parenthèse pour signaler que tel est également le point de vue de votre père, André Récipon. Fermons la parenthèse.  Dans cette mission de « défense de la civilisation latine » qu’il s’était fixé, Raoul Follereau a côtoyé, voire collaboré, avec de hautes personnalités que la réputation précède : nous avons ainsi recenser des liens avec Henry Coston, Xavier Vallat, Louis Darquier de Pellepoix, Armand de Chastenet de Puységur, Jacques Ditte, Philippe Henriot, Roger de Saivres, Philippe de Zara, Jean-Pierre Maxence, Armand Bernardini-Sjoestedt, les Bellat de Sidi-bel-Abbès, l’abbé Lambert d’Oran, Georges Oltramare de Suisse, Paul Hoornaert, Fernand Dirix et Léon Degrelle de Belgique, etc. Dans sa revue mensuelle L’Œuvre Latine, outre les ouvrages des « auteurs-clients » des éditions de la Jeune Académie, il promeut les ouvrages de personnalités comme Henry-Robert Petit, Albert Monniot, Léon de Poncins, Mgr Jouin et son Cercle homonyme, etc. Il faut savoir que tous ces personnages s’illustrèrent à divers degrés par leurs accointances avec les idées antisémites, antibolcheviques et antimaçonnes. D’ailleurs, Raoul Follereau va même jusqu’à recommander aux membres de sa Ligue d’Union latine et plus généralement « aux amis de la France », la lecture des Protocoles des Sages de Sion, célèbre pamphlet sur un supposé complot judéo-maçonnique contre la civilisation chrétienne (L’Œuvre Latine, novembre 1938). En effet, Raoul Follereau adhère pleinement à cette théorie d’une « offensive satanique » ourdie par Israël aidé en cela par les « Rouges » et les « Loges » : nous avons diffusé sur notre blog la couverture tout à fait explicite du numéro de décembre 1938 de L’Œuvre Latine à ce sujet. Ses écrits confirment cette affirmation. Ainsi, à l’occasion de violents articles contre les « Sans-Patries » et les « Sans-Dieu », Raoul Follereau reprend à son compte la théorie du complot mené par les juifs : « Encore une fois, qu’on ne s’y trompe pas, tout ceci fait partie d’un plan absolument officiel, préparé de longue date avant même que le communisme ait épouvanté une partie de la terre. La rouge bande de Moscou n’a fait que le prendre à son compte. C’est chez lui, d’abord, qu’il faut l’abattre, puis, remontant aux sources mêmes, écraser du talon les vipères ignobles. » (Raoul Follereau, L’Œuvre Latine, août- septembre 1934). Ou encore : « Il faut le dire. Si le bolchevisme a pu parfois provoquer ses ravages, c’est qu’il a trouvé devant lui des âmes en état de moindre résistance, des âmes anémiées (…). Le bolchevisme n’est que la hyène qui achève l’agonisant pour se repaître du cadavre. Les assassins de l’homme sont de plus ancienne lignée. » (Raoul Follereau, La trahison de l’intelligence, 1936).  De façon générale, celui dont la vie est censée n’avoir été qu’un seul acte d’Amour n’aime pas les étrangers. Il n’aime que les Français. Et encore, il n’aime que les « vrais » Français. Ainsi, dès 1930, dans sa conférence Le sourire de la France, Raoul Follereau qualifie de « dangereux » le fait même d’être un étranger : « Je n’ai rien contre cet étranger [Freud], sinon qu’il est étranger et dangereux en tant que tel ». Et pour dénoncer l’emprise étrangère sur les « faux » Français, il n’hésite pas à écrire que « Paris n’est pas toujours en France ». Toujours concernant les étrangers, il dénonce, dans L’Œuvre Latine du mois de janvier 1934, les « excentricités de quelques métèques », et les « flots envahisseurs » faisant ainsi allusion aux immigrés. Il regrette « l’incohérence de la résistance blanche devant le péril jaune ». Il qualifie ses contradicteurs d’« agents de la décomposition nationale ».  Mais sa verve s’adresse aussi aux affaires intérieures : suite aux manifestations du 6 février 1934, dans le numéro de L’Œuvre Latine de mars 1934, ce sont d’abord les pouvoirs républicains qui sont inondés d’insultes : « petite fripouille », « bonne à tout faire », « gardes mobiles (…) gorgés d’alcool », « petit arriviste, petit ambitieux, petit vaniteux, petit … surtout », « fossoyeur des ailes françaises », « traîtres ». Puis il en revient à sa cible favorite : les étrangers et l’Anti-France : « Voleurs », « pilleurs », « chacals, hyènes, charognes », « Sans-Patrie et (…) Anti-France », « tourbe immonde que le grand souffle régénérateur va balayer », « voyous », « métèques ». Les juifs étrangers qui se trouvent sur le territoire français ne sont pas oubliés et Raoul Follereau a vite fait de les considérer comme « les cadre de l’armée du crime » au service de l’étranger contre la France, véritable « pourriture » dont il conviendrait se débarrasser au plus vite : « Berlin et Moscou ne se contentent plus d’envoyer leur or aux mauvais français. Ils y joignent maintenant à la faveur d’un exil, sous des prétextes de race ou de confession, les cadres de l’armée du crime. Évidemment, pour eux, ce n’est pas désagréable de tirer sur des Français… Et puis, il faut bien se maintenir en forme, n’est-ce pas ? Qu’on débarrasse la France de cette pourriture ! Et vite ! ».  Concernant les indigènes algériens qui ne se satisfont pas d’une citoyenneté de second rang dans la  France coloniale, Raoul Follereau voit ici aussi la main de l’étranger et va jusqu’à réclamer que les meneurs soient pendus, pour l’exemple, afin que nul n’ose plus s’attaquer à l’Empire colonial français : «  Le remède (…)  tient en deux mots. Arrêter et pendre – pas fusiller, pendre – les meneurs, des étrangers pour la plupart, qui préparent un des plus immenses crimes qu’ait connu l’Histoire. (…). Il faut réagir, faire un exemple que comprennent et dont se souviendront des esprits aujourd’hui égarés en des espoirs sanglants et fous … La propagande faite en France d’Afrique contre la France est un crime, le plus révoltant et le plus dangereux de tous. Il est commis, ce crime, par des gens qui n’ont rien de Français, pas même le nom, sur des ordres et avec des moyens spécifiquement étrangers. » (L’Œuvre Latine, août-septembre 1936) Dernière citation, en juin 1941, Raoul Follereau se réjouit de l’attaque de l’Allemagne nazie contre Staline. Il y voit dans cette alliance de « l’Europe nouvelle » contre le « bolchevisme » la concrétisation d’une proposition qu’il avait faite dès 1936 de d’unir les peuples latins contre la « géhenne » rouge : l’« Union des Patries ». Il avait alors reçu le soutien de fascistes européens comme Georges Oltramare de Suisse ou de Paul Hoornaert et de Léon Degrelle de Belgique. Son seul regret fut que ce ne soit pas la France qui ait été la tête de cette « croisade ».   Monsieur le Président, vous avez hérité de la direction des œuvres fondées ou inspirées par Raoul Follereau ; vous dirigez aujourd’hui une Fondation reconnue d’utilité publique qui affirme s’inscrire dans la continuité des œuvres de son fondateur et qui collecte chaque année quelques 15 millions d’euros.  Vos salariés, bénévoles et donateurs sont en droit de savoir ce que vous avez à dire sur ces points précis du passé de Raoul Follereau. Maintenez-vous que Raoul Follereau a consacré toute sa vie pour la défense des lépreux ? Maintenez-vous que toute la vie de Raoul Follereau ne fut qu’un seul acte d’Amour ?  Fin du courrier.

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