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31 juillet 2010 6 31 /07 /juillet /2010 17:41

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 

 

Nous poursuivons nos travaux d'étude sur la vie de Raoul Follereau et ses faces cachées.

 

http://www.artcurel.it/ARTCUREL/PERSONAGGI/Follereau1.jpg 

 

Rappels du contexte

 

Précédemment, nous avons exposé les idées politiques de Raoul Follereau. Nous avons ainsi vu que Raoul Follereau a été un fervent partisan d'une conception réactionnaire et antimoderniste de la société française et de ses institutions.


Pour Follereau, la civilisation latine se définit par l'Ordre, la Clarté et la Discipline. Les valeurs prioritaires sont, avant toute autre chose, Dieu et la Patrie (considérés comme un "Idéal") ainsi que la Famille et le Travail (voir ici).


http://jmguieu.free.fr/Enseignements/L3_France_Allemagne_Europe/Maurras.jpgAvec sa Ligue d'Union Latine, fondée en 1927, Raoul Follereau se donne pour objectif de "défendre la civilisation chrétienne contre tous les paganismes et toutes les barbaries".

 

Sont visées les forces de l'anti-France dénoncées par Charles Maurras - le maître à penser de Raoul Follereau - et, de façon générale, tous les ennemis de la "France réelle".


Parmi les ennemis de la "France réelle" dénoncés par les maurassiens, nous pouvons comprendre :

  • - les sans-Dieu, tels les francs-maçons et autres laïcistes à l'origine des lois anti-religieuses de 1904 et de séparation de l'Église et de l'État de 1905,
  • - les sans-Patrie tels les internationalistes que sont supposés être les communistes et les Juifs,
  • - les non catholiques tels les Juifs, à nouveau, mais également les protestants,
  • - les catholiques modérés et ralliés à la République, tels les membres du Sillon,
  • - et, de façon générale, toutes celles et tous ceux qui sont influencés par le modernisme, l'idéologie bourgeoise, libérale et individualiste.

Dans ce contexte, il n'est guère étonnant de lire le passage suivant (Étienne Thévenin, Raoul Follereau, Hier et aujourd'hui, Fayard, 1992, page 151) :


http://www.ilep.org.uk/uploads/pics/Raoul_Follereau.jpg

 

 

"Pour Raoul Follereau et de nombreux catholiques maurassiens, le Maréchal Pétain est l'homme providentiel qui gomme la période 1789-1940. 

 

Il est le sauveur envoyé à la France aux yeux que ceux qui depuis des années rêvaient de héros et de personnages exemplaires et fustigeaient la IIIème République.

 

 


Cette attraction de Raoul Follereau pour le Maréchal Pétain n'est pas nouvelle. En 1937, déjà, Raoul Follereau vantait dans son numéro de mai de L'Œuvre latine son "prestige", son "autorité" et sa "gloire universelle". De façon générale, le maréchal Pétain bénéficiait d'une excellente notoriété dans les milieux d'extrême-droite et, plus généralement, auprès d'une grande partie des Français.

 

http://www.histoire-de-france-et-d-ailleurs.com/images/AffichePetain1942.jpg

Exemple de propagande du régime de Vichy

autour de la personne du Maréchal 

 

 

 

Raoul Follereau au service de la Révolution Nationale

 

http://a31.idata.over-blog.com/3/50/02/30/Histoire/2eme-guerre/10-juillet-1940.jpgConcrètement, Raoul Follereau compte bien mettre à profit la "divine surprise" (la formule est de Charles Maurras) que constitue l'accession au pouvoir du Maréchal Pétain.

 

Le 10 juillet 1940, date à laquelle les parlementaires français réunis à Vichy accordent les pleins pouvoirs à Philippe Pétain, Raoul Follereau s'y trouve également.

 

Il sait que ses idées, toutes ses idées, sont à l'honneur.

 

Selon Thévenin, Raoul Follereau aurait décliné, à plusieurs reprises, des propositions de postes dans le gouvernement de Vichy. Non pas pour des raisons de désaccord sur le fond, mais dans le souci de conserver sa liberté d'action (Thévenin, page 152).

 

Toujours est-il que, dans les mois qui vont suivre, Raoul Follereau va multiplier ce qu'il sait faire de mieux : les conférences. Chaque jour, nous raconte Thévenin, il part en voiture et multiplie les conférences dans des villes et bourgs de toutes tailles. Lors de ces conférences à la fréquentation variable, Raoul Follereau se fait l'avocat du Maréchal Pétain. Il met ses indéniables talents oratoires au service des  "thèmes moraux de la Révolution nationale" (Thévenin, page 155).


http://webplaza.pt.lu/ffl/images/RF028.jpgIl convient ici de préciser que le pétainisme de Raoul Follereau ne fut pas une erreur de jeunesse ou un soutien ponctuel.

 

Il faut le dire clairement : l'adhésion de Raoul Follereau aux idées de la Révolution Nationale relève d'une démarche intellectuelle profondément ancrée en lui. Elle remonte au milieu des années 1920, période pendant laquelle il se forge une conscience politique au contact de la faculté de droit et de l'Action française qui y règne en maître (ici).

 

Même si, après la guerre, Raoul Follereau aura appris la prudence et taira ses convictions politiques profondes, son pétainisme restera intact jusqu'à sa mort (ici).

 

Étienne Thévenin nous l'indique :

  • - à la fin de la guerre "Raoul Follereau reste fidèle à la personne du Maréchal"  (Thévenin page 175) ;
  • - en 1945, Raoul Follereau est "atterré et bouleversé par la condamnation à mort du Maréchal Pétain" ;
  • - à la même période, Raoul Follereau "assiste, impuissant, à la déroute de ses idées (...) Il s'écarte alors de l'engagement politique" (page 183) ;
  • - en 1950 "ses rapports avec le monde politique ont changé après la guerre, même s'il a conservé l'essentiel de ses idées" (Thévenin, page 238).

C'est André Récipon lui-même qui nous donne l'ultime confirmation du pétainisme persistant de Raoul Follereau : "Toute sa vie, Raoul Follereau restera fidèle au Maréchal" écrit-il en 2001 dans la revue Le Maréchal de l'Association pour Défendre la Mémoire du Maréchal Pétain que nous avons déjà abordée ici.

 

http://www.ffl.lu/mmp/online/website/menu_vert/raoul_follereau/56/image_1390/photo_rf.jpg

 

Cela mérite donc un examen de ce que sont le pétainisme et la Révolution Nationale.

 

 

Qu'est-ce que la Révolution Nationale ?

 

Il serait ambitieux de prétendre résumer les "thèmes moraux de la Révolution Nationale" dans cet article qui veut tenter de rester court et didactique.


http://www.maxicours.com/img/2/2/8/1/22811.gif

 

Le premier axe de réflexion qui mérite d'être signalé, c'est le fait que le Maréchal Pétain s'inscrit dans une démarche de redressement moral rendu nécessaire par la déliquescence de la société française. Cette situation serait la conséquence directe du régime parlementaire de la IIIème République.

 

Pour Pétain (rejoint en cela de nombreux auteurs militants d'extrême-droite dont Raoul Follereau ainsi que André Récipon - voir ici son propos sur les causes de la guerre), la véritable cause de la défaite de juin 1940 est à chercher dans ce système démocratique néfaste et non dans l'armée et dans ses chefs.

 

D'ailleurs, Pétain n'a pas attendu le début effectif des hostilités concrètes pour faire preuve de défaitisme. Il ne cache pas aux oreilles ennemies son sentiment sur l'issue de la guerre : ainsi, dès novembre 1939 (donc deux mois après les déclarations de guerre entre la France, l'Angleterre et l'Allemagne mais encore en pleine "drôle de guerre"), le Maréchal Pétain est réputé, dans les chancelleries italiennes et allemandes, pour être en France le représentant de ceux qui souhaitent la paix et l'arrêt des hostilités avec l'Allemagne nazie  (page 9 de la préface de Maurice Moissonnier dans De la République à l'État français : le chemin de Vichy, 1930-1940, Jean Lévy, éditions L'Harmattant, consultable en partie sur internet ici).

 

Au printemps 1940, alors qu'il est ambassadeur de France auprès de Franco et tenu à un évident devoir de réserve et de discrétion sur son propre pays, ses propos sur la désorganisation de la France sont  rapportés jusqu'à Berlin (ibid).

 

Le 18 mai 1940, soit après seulement huit jours d'hostilités, alors qu'il est devenu président du Conseil, il s'épanche auprès de l'ambassadeur espagnol sur ce qu'il estime être un désastre militaire en cours, propos immédiatement retranscrit aux Allemands (ibid).

 

Ces indiscrétions communiquées à l'oreille des ennemis sont évidemment scandaleuses pour un miitaire digne de ce nom.  Dans un sysème pénal ordinaire, ces faits seraient passibles du peloton d'exécution pour haute trahsion. Néanmoins, ce n'est pas ce qui nous intéresse ici. Nous y voyons surtout la démonstration que, pour le Maréchal Pétain, le problème se situe avant tout à un niveau institutionnel et politique et non à une niveau strictement de stratégie militaire.

 

La Révolution Nationale entend donc se construire d'un point de vue institutionnel par opposition à ce que la France a connu au cours des soixante dernières années et, plus généralement, depuis l'abolition de la monarchie due à l'émergence des idées libérales et modernistes de 1789.


http://www.marechal-petain.com/images/appel.jpg

 

 

"Notre défaite est venue de nos relâchements. L'esprit de jouissance détruit ce que l'esprit de sacrifice a édifié. C'est à un redressement intellectuel et moral que, d'abord, je vous convie."

(Pétain, discours du 25 juin 1940). 


"Le désastre n'est (...) que le reflet, sur le plan militaire, des faiblesses et des tares de l'ancien régime politique."

(Pétain, discours du 11 octobre 1940).

 


 

 

Sur les principes, l'État français de Vichy sera par conséquent un régime politique antidémocratique, fortement hiérarchisé, qui repose sur l'effacement des libertés individuelles devant l'intérêt supérieur des cellules fondamentales que sont la famille, la corporation professionnelle, la commune, la région, ou la patrie.

 

Ce régime s'inspire directement, mais pas en totalité, des conceptions de Charles Maurras.

 

http://www.marechal-petain.com/images/revolution_nationale.jpg

 

 

 

Vichy : un régime raciste et xénophobe

 

 L'élément sous-jacent de la pensée de Charles Maurras, et donc, automatiquement, du régime de Vichy, consiste dans l'assainissement de la nation française.


En effet, selon Charles Maurras et ses disciples, le déclin de la France a été causé par des éléments nuisibles intérieurs qui l'ont écartée de sa vocation royale et chrétienne.


http://www.histoire-de-france-et-d-ailleurs.com/images/affichepavillonhaut.jpgLes tous premiers textes législatifs et réglementaires du Maréchal Pétain vont justement avoir pour objectif de restaurer la cohésion de la communauté nationale.

 

D'ailleurs, le Maréchal Pétain de fait pas secret de ses sentiments personnels : "Voici ma formule que je vous donne, je n'aime pas les Juifs, je déteste les communistes et je hais les francs-maçons" (page 9 de la préface de Maurice Moissonnier dans De la République à l'État français : le chemin de Vichy, 1930-1940, Jean Lévy, éditions L'Harmattant, consultable en partie sur internet ici).


 Ainsi, dès juillet 1940, des mesures sont prises afin d'écarter les francs-maçons des postes importants de la fonction publique. Par exemple, un homme comme Bernard Faÿ, nommé administrateur général de la Bibliothèqe nationale le 6 août 1940, sera chargé de mener la lutte contre l'influence des réseaux francs-maçons : édition de la revue Les documents maçonniques, réalisation d'un film et de conférences, création d'un répertoire nominatif comptant jusqu'à 60.000 fiches, etc.

 

Il en est de même concernant les communistes dont la traque systématique sera une constante du régime de Vichy de 1940 jusqu'à la Libération, a fortiori après le 22 juin 1941.

 

Outre les francs-maçons et les communistes, ce sont les Juifs, français et surtout étrangers ou d'origine étrangère, qui subissent le plus d'exactions.

 

Il n'est pas question de retranscrire ici toute la politique antisémite du régime de Vichy. Nous nous contenterons de n'en citer que quelques dates.

 

Par exemple, le régime de Vichy va réexaminer, par une loi du 16 juillet 1940 (moins d'une semaine après l'octroi des pleins pouvoirs !), les naturalisations postérieures à la législation antérieure datant de 1927. Sur 195.000 naturalisations, plus de 15.000 personnes seront déchues de leur nationalité française, dont 7.000 Juifs environ. Concrètement, cela signifie que des personnes devenues françaises depuis parfois plus de 10 ans, en toute légalité, deviendront apatrides ou devront reprendre leur nationalité antérieure.

 

Des décisions qui, bien souvent, leur seront fatales pour la suite des événements.

 

http://www.epf.lu/srf2010/images/Follereau.pngDans le même esprit, le décret Crémieux de 1870 qui permettait l'accession à la nationalité française des Juifs d'Algérie renonçant à leur statut personnel est abrogé. Rappelons que Raoul Follereau est particulièrement proche des milieux d'Unions latines en Afrique du Nord (ici ou ici). Il ne peut ignorer que cette abrogation était fortement souhaitée et attendue par les milieux antisémites qui s'y trouvent.


Par une loi du 27 septembre 1940, tout étranger "en surnombre dans l'économie nationale" peut être interné sur décision administrative. Le 4 octobre, il en est de même pour les Juifs étrangers, mais sans conditions "de surnombre".


Le 3 octobre 1940, le premier statut des Juifs de Vichy exclut tous les Juifs de la fonction publique de l'État, de l'armée, de l'enseignement, de la presse, de la radio, du cinéma, ainsi que de certaines professions libérales. À propos du rôle de Pétain dans l'élaboration du statut des Juifs - en faveur d'un éventuel durcissement du projet initial - voir cet article pondéré d'Alain Michel : "Ce document n'apporte rien d'essentiel sur le statut des juifs d'octobre 1940. Nous savons depuis longtemps que le maréchal a insisté pour aggraver le projet, et le document vient seulement le confirmer. Il est intéressant sur le plan de la mémoire, bien plus que sur le plan de la connaissance historique, à laquelle il n'apporte rien de neuf" (ici).

 

http://1.bp.blogspot.com/_ClYcSaPsLm4/SU5Wxwt1oSI/AAAAAAAAB1k/OmyRlxgX0Pg/s1600/AffAntiS%C3%83%C2%A9mite.jpgCe premier statut sera renforcé par un second statut du 2 juin 1941, étendant significativement les interdictions professionnelles des Juifs. Ce deuxième statut permet également l'internement des Juifs français sur décision administrative, entre autres mesures vexatoires.


Le 22 juillet 1941, la loi d'aryanisation permet une véritable opération de spoliation des biens appartenant aux Juifs en zone libre (entreprises, commerces, valeurs mobilières, biens immobiliers autres que la résidence principale, etc.). C'était déjà le cas dès octobre 1940 en zone occupée.


De façon générale, le recensement, le port de l'étoile jaune en zone occupée ou l'apposition de la mention JUIF sur les papiers d'identité en zone libre, la multiplication des entraves à la vie personnelle et professionnelle participent à une stratégie d'isolement et de fragilisation des conditions de vie des Juifs.

 

Cette stratégie aura pour effet - souhaité ou non - de faciliter, le moment  venu, les futures rafles qui débutent d'ailleurs dès 1941.


Il convient de souligner ici que ces réglementations racistes et antisémites relèvent bel et bien du projet de société porté par le Maréchal Pétain.

 

Charles Maurras lui-même avait proposé, dès le début du XXème siècle un statut des Juifs dans lequel la nationalité française leur serait interdite.


http://alnr.chez-alice.fr/31.jpgConcernant Raoul Follereau, nous disposons de preuves qui démontrent qu'il animait et participait durant les années trente à des conférences de la droite de l'extrême-droite dans lesquelles il s'insurgeait contre l'importance que les Juifs auraient pris, selon lui, dans "toute l'industrie et le commerce" (voir notre article ici).

 

Dès 1936, Raoul Follereau donne des signes d'adhésion au complot judéo-bolchevique selon lequel la Révolution russe de novembre 1917 a été manigancée et pilotée par des forces occultes juives ("Lénine, ce Moïse rouge" dans La trahison de l'intelligence).

 

Dans un numéro de La Libre Parole de 1936 que nous avons analysé ici, des propos précurseurs de ce que sera la législation antisémite du régime de Vichy sont clairement tenus par des individus de sinistre mémoire, tels Jacques Ditte, Louis Darquier de Pellepoix ou Henry Coston. Raoul Follereau fréquente ces individus et partage la tribune avec eux. Apparemment, il n'en ressent ni gêne ni honte et encore moins de remords.


Par conséquent, l'antisémitisme du régime de Vichy lui est à la fois antérieur et consubstantiel : il n'a pas besoin des pressions allemandes pour exister. Si pressions allemandes il y a eu, elles ne sont venues que conforter une inclinaison antisémite préexistante dans le projet politique du Maréchal Pétain.


Les écrits de Raoul Follereau ainsi que la pensée politique développée dans ses conférences des années trente (voir ici) comporte un antisémitisme à la fois explicite (complot judéo-bolchevique) mais aussi implicite : le mouvement de pensée de type national-catholique auquel nous affilions volontiers Raoul Follereau croit en une France catholique, fille aînée de l'Église, chargée d'une mission spécifique d'expansion de la civilisation chrétienne.

 

http://eucharistiemisericor.free.fr/images/270108_raoul_follereau.jpg

 

Dans ce cadre, il devient logique de considérer le non-catholique, qu'il soit juif, bolchevique ou franc-maçon comme un obstacle à la la mission chrétienne de la France.  

 

 

http://www.histoire-immigration.fr/upload/file/ext_para_col1_image_231_Affiche_juif_france.jpg

 

 

 

Vichy : un régime qui verse dans la collaboration à outrance

 

La première période réactionnaire et maurrassienne du régime de Vichy va, progressivement, céder la place à une nouvelle dimension : la collaboration à outrance.


Néanmoins, avant de poursuivre, il convient de rappeler quelques éléments de contexte.


http://www.herodote.net/Images/HitlerCompiegne1940.jpgEn juillet 1940, Pétain et ses sbires sont convaincus que la guerre sera courte : soit l'Angleterre, consciente des faiblesses de son armée de terre, recherchera la paix avec l'Allemagne , soit elle se fera écraser sur son propre sol par les puissances de feu réunies de la Wehrmacht et de la Luftwaffe.


Si on veut bien entendre l'analyse géopolitique de Pétain, sa stratégie de collaboration qui consiste à trouver les moyens d'offrir à la France la meilleure place possible dans le futur nouvel ordre européen, nécessairement germanocentré, peut alors se comprendre : une fois la paix revenue en Europe, un traité franco-allemand conclu en bonne et due forme viendrait libérer la zone occupée des armées allemandes ainsi que les deux millions de prisonniers retenus outre-Rhin. Pour Pétain, l'armistice de juin 1940 n'est donc qu'une étape temporaire qui sera nécessairement courte.


Or, à la fin de l'automne 1940, la bataille d'Angleterre est remportée par les Spitfire de Churchill. La guerre, finalement, sera longue et les Anglais, après ce qu'ils ont enduré, sont visiblement décidés à aller jusqu'au bout. Qui plus est, les américains donnent de plus en plus de signes qu'ils ne resteront pas impassibles devant le théâtre des opérations en Europe. 


Par conséquent, à la fin de l'année 1940, la stratégie de Pétain basée sur une paix européenne rapide ne tient plus. Pour autant, Pétain et Weygand ne croient toujours pas à une victoire britannique. Ils imaginent, au mieux, que le conflit s'arrêtera sans vainqueur ni vaincu : la fameuse "paix blanche" dont la France serait l'inéluctable perdante.


http://medias.lepost.fr/ill/2008/04/27/h-20-1186405-1209311356.jpgIl faut également dire que Pétain n'a pas un caractère très offensif. Déjà, en 1917, il est réputé pour avoir attendu les américains. Cela a sauvé des hommes, peut-être, mais, selon Éric Zemmour, cela a surtout privé la France d'une victoire totale sur l'Allemagne.

 

Paradoxalement, toujours selon Zemmour, c'est parce qu'aucun soldat français n'a défilé en vainqueur en 1918 à Berlin que Hitler put le faire à Paris en 1940 (source ici). Mais nous digressons.


En plus de cela, Pétain - et son entourage - restent violemment anglophobes.

 

Les militaires français reprochent aux anglais leurs réticences à engager la RAF pendant les périodes les plus cruciales de la campagne de France de mai/juin 1940.

 

De même, l'évacuation de Dunkerque a généré de la méfiance dans le haut commandement français, notamment le général Weygand qui se trouve être un des bras droit de Pétain.

 

Enfin, le bombardement de Mers el-Kébir du 3 juillet 1940 a achevé de ressusciter une haine franco-anglaise quasi ancestrale.


 Enfin, Pétain n'a plus assez d'hommes en métropole pour relancer les hostilités. Il faut dire que son annonce radiophonique du 17 juin 1940 annonçant qu'il fallait "cesser le combat" et que l'armée française "avait rempli son devoir vis-à-vis de nos alliés" a eu un effet désastreux : par milliers, les soldats français se sont rendus à l'ennemi.

 

Et qui irait le leur reprocher ?

A quoi bon se faire trouer la peau si Philippe Pétain en personne, Maréchal de France et Président du Conseil, vient affirmer que cela n'en vaut plus la peine ?

 

C'est triste à dire, mais sans s'en rendre compte, c'est plusieurs centaines de milliers de soldats français que le Maréchal Pétain a ainsi envoyé en Allemagne pour quatre années de détention dans des Stalags.




Allocution du 17 juin 1940 par le maréchal Pétain
envoyé par oualabis. - L'info video en direct.

 

 

http://www.crdp.ac-creteil.fr/cddp94/Animation/resistance_2008/img/AffichepourSTO1943.jpg Quelques mois plus tard, le 22 juin 1941, les armées de l'Axe envahissent l'immense territoire soviétique.

 

Pour certains technocrates de Vichy, la guerre en Europe prend alors une nouvelle dimension : il s'agit plus d'être pour ou contre l'Allemagne nazie ; il s'agit dorénavant d'être pour ou contre le bolchevisme de Staline.


La raison d'être d'une partie des collaborateurs du régime de Vichy va donc progressivement glisser de la nécessité de se faire une place au soleil dans l'Ordre nouveau allemand à la nécessité de lutter pour la défaite du bolchevisme quitte à ce que cela passe par la victoire du nazisme.


C'est la formule de Pierre Laval du 22 juin 1942 : "je souhaite la victoire de l'Allemagne car, sans elle, le bolchevisme, demain, s'installerait partout".

 

http://www.tao-yin.com/edito/img/maquis_milice.jpgPour Raoul Follereau cette logique de raisonnement n'est pas nouvelle.

 

Dans les années 1920, Raoul Follereau a admiré  Bénito Mussolini parce qu'il a vu en lui le protecteur de la civilisation latine face aux dangers du bolchevisme.

 

À partir de 1936, Raoul Follereau considère la guerre civile espagnole comme une machination satanique et judéo-bolchevique contre laquelle il entend mener une véritable guerre sainte.


Il est peu de dire que Raoul Follereau est habité par des sentiments violemment antibolcheviques. Son livre de 1936, La trahison de l'intelligence est, pour une grande partie, un exposé sur ce thème.

 

De même, voici ce qu'il écrivait, en décembre 1939, dans l'édito de son journal, L'Œuvre latine :


http://blufiles.storage.live.com/y1pOGTQtLI8I4hBirE9GeGe3QcjcKjLQahRtFjqugGJ28EWQrfdtb294tN-1Uo6e_y8faXXzqFtB3M"La grande Allemagne doit disparaître (ndlr nous sommes en pleine drôle de guerre). Mais la lutte ne s'arrêtera pas à notre victoire ... le jour de l'armistice marquera le commencement d'une autre lutte plus dure encore et plus décisive : celle qui doit délivrer le monde du bolchevisme. Et cette guerre ne sera pas seulement aux frontières mais dans chaque pays, parfois dans chaque foyer. Il faut tuer l'idée maudite, ligoter cette philosophie dégoûtante de sang et l'étouffer dans son propre carnage... le bolchevisme a voulu la guerre. C'est seulement sur sa tombe que nos soldats vraiment victorieux pourront édifier la paix française. Et cette paix française sera chrétienne. (...) la paix devra détruire pour longtemps sinon pour jamais tout cet orgueil satanique, tout ce matérialisme bestial qui a submergé le monde depuis plus d'un demi-siècle."

 

 La conséquence de ce glissement du régime de Vichy est son évolution progressive vers la collaboration à outrance. Cette collaboration à outrance prend alors plusieurs formes : économique, financière, militaire, etc.

 


 

Vichy : un régime vassalisé et asservi

http://fxeuzet.free.fr/blog/1941/france/15-05.jpg

 

Au fil du temps, le régime de Vichy va devenir une sorte d'État servile, marionnette dont le peu d'autonomie est utilisée pour satisfaire la puissance occupante.


Tout d'abord, il convient de préciser que, dès juillet 1940, les Allemands ont montré quelle était leur perception du respect de la convention d'armistice.


En effet, alors que la convention d'armistice ne prévoyait aucune diminution du territoire national français, les Allemands procèdent, dès le 4 juillet 1940, à l'annexion de facto de l'Alsace-Lorraine.


Concrètement, les autorités civiles sont expulsées (préfets, sous-préfets, maires), les élites francophones ou réputées francophiles également, la ligne de frontière et des douanes est déplacée de facto sur la ligne décidée par Bismarck en 1871, la langue allemande est imposée pour tous les actes de la vie courante, les noms de rue sont germanisés, etc.


De même, les français ayant acquis des biens immobiliers après le 11 novembre 1918 sont expropriés sans indemnités, les Juifs ayant fui leurs maisons sont interdits de retour, ceux qui étaient restés sur place sont expulsés sans ménagement vers la zone libre, etc.

 

Face à cet abus de pouvoir, le gouvernement de Vichy ne dépassera jamais le stade des protestations d'usage.


Dans le même ordre d'idée, Hitler avait prévu une zone de peuplement allemand dans laquelle le retour des réfugiés était officiellement interdit (voir carte ci-dessous) en totale contradiction avec la convention d'armistice.

 

Son objectif ne fait guère de doutes et ce point est confirmé par les archives diplomatiques : Adolf Hitler avait clairement pour volonté de dépecer la France. En créant une zone territoriale "tampon" où l'installation de germanophones en grand nombre serait facilitée, Hitler anticipait pour 5, 10 ou 20 ans plus tard, un rattachement au grand Reich. Dans les faits, heureusement, ce projet ne pourra pas être mis en application. Mais cela démontre malgré tout l'état d'esprit d'Hitler sur les relations franco-allemandes.

 

http://www.hist-geo.com/Carte/France/1940-1942/Armistice-22-Juin-1940.png



Dans le même ordre d'idée, la convention d'armistice prévoyait le versement, par la France, d'une indemnité d'occupation.

 

Or, cette indemnité se révéla, à l'usage, être fixée arbitrairement par l'Allemagne. via la parité franc-mark. Concrètement, c'est une perfusion financière permanente que l'Allemagne va s'octroyer sur le dos de la France. Concrètement, les indemnités atteindront des sommes hallucinantes (400 millions par jour acceptés sans négociation par le Maréchal Pétain) sans aucun rapport avec le coût réel de l'occupation qu'elles étaient sensées compenser.


http://fxeuzet.free.fr/blog/1942/france/14-04.jpgEn outre, la prestation de la France vis-à-vis de l'Allemagne ne s'arrête pas à des versements pécuniaires. L'Allemagne va directement utiliser la puissance industrielle et agricole à son profit et ponctionner la production nationale autant qu'elle le pourra.

 

Entre les volontaires pour le travail en Allemagne, les jeunes gens enrôlés de force dans le STO, et les réquisitions forcées, la France constitue une ressource précieuse pour l'économie de guerre allemande.

 

Cela fera dire au Général von Senger und Utterlin de la Commission d'armistice allemande :

 

"Sans le potentiel économique de la France, Hitler n'aurait pas pu faire durer la guerre aussi longtemps. C'est cela qui fut le grand profit qu'Hitler tira de la conquête de la France".

 


Fin 1942, une nouvelle humiliation attend le Maréchal Pétain. Hitler invoque le débarquement des anglo-saxons en Afrique du Nord pour considérer désormais sans effet la convention d'armistice du 22 juin 1940 et envahir la zone libre.

 

Au cas où Pétain croyait encore disposer d'un minimum de souveraineté et de légitimité, le voilà fixé. Ultime humiliation, l'invasion de la zone libre est réalisée ... le 11 novembre. Tout un symbole.


Entre temps, les Allemands se sont clairement immiscés dans la politique du gouvernement de Vichy. Le retour de Pierre Laval, démissionné par Pétain en décembre 1940 est exigé par les Allemands et obtenu le 17 avril 1942 en remplacement de l'Amiral Darlan.


Autres exemples de la perte de souveraineté du régime de Vichy face à l'autorité occupante : le Général Weygand, proche parmi les proches du Maréchal Pétain est arrêté par les Allemands, contre l'avis du Maréchal Pétain.

 

Quelle est la dignité d'un État qui ne peut même pas s'opposer efficacement à l'arrestation et à la déportation d'un de ses principaux fonctionnaires ?

 

Emprisonné dans le Tyrol autrichien, au château d'Itter, il y rejoint les soi-disants responsables politiques de la défaite de 1940 comme Gamelin, Reynaud ou Daladier. Ces derniers, bien que tous de nationalité française et soumis aux juridictions françaises, avaient été livrés par Pierre Laval aux Allemands.

 

Quelle est la dignité d'un État qui livre volontairement ses prisonniers à une puissance étrangère ?

Le régime de Vichy était-il déliquescent à ce point qu'il ne savait plus garder une geôle ?


Par la suite, à partir du début de 1943, le régime de Vichy sombre dans sa période la plus noire et la plus honteuse. Les Allemands imposent la présence d'hommes tout dévoués à leur cause tels Philippe Henriot, Marcel Déat et Joseph Darnand. Jusqu'au bout, le Maréchal Pétain et Pierre Laval garderont le cap et l'illusion d'être au service de la France.

 

En réalité, le régime de Vichy est devenu progressivement une des plus grandes hontes de l'Histoire de France. Deux exemples illustrent cette situation : la création de la Milice, chargée d'épauler les forces allemandes dans la lutte contre les réseaux de résistance (Vercors), les réfractaires du STO, les Juifs et autres communistes, même sans défense (assassinat de Mandel) et la création (dès juillet 1941) de la LVF qui ira combattre sur le front russe sous l'uniforme Waffen-SS avec la bénédiction du Maréchal Pétain.

 

 

Conclusions et responsabilités devant l'Histoire


En quelques mois, de juillet 1940 à janvier 1943, le régime de Pétain est passé de l'illusion du redressement national à la servitude la plus indigne. N'étant capable de que protestations aussi vaines que pathétiques, le Maréchal Pétain a entraîné la France sur la pente du déshonneur. Aujourd'hui, il n'existe que peu d'historiens sérieux pour prétendre que le Maréchal Pétain a servi utilement et dignement sa patrie. Au pire, le Maréchal Pétain est un traître qui a vendu la France à l'ennemi allemand ; au mieux, le Maréchal Pétain était trop usé par le poid des ans pour être l'homme de la situation qu'il prétendait être.


Le 30 octobre 1940, après avoir rencontré Hitler à Montoire, le Maréchal Pétain s'exprimait ainsi au peuple de France :


"Français,


http://www.marechal-petain.com/images/montoire2.jpgJ’ai rencontré, jeudi dernier, le Chancelier du Reich. (...)

  

C'est dans l'honneur et pour maintenir l'unité française, une unité de dix siècles, dans le cadre d'une activité constructive du nouvel ordre européen que j'entre aujourd'hui dans la voie de la collaboration.

 

Ainsi, dans un avenir prochain, pourrait être allégé le poids des souffrances de notre pays, amélioré le sort de nos prisonniers, atténuée la charge des frais d'occupation.

 

Ainsi pourrait être assouplie la ligne de démarcation et facilités l'administration et le ravitaillement du territoire.

 

(...) La France est tenue par des obligations nombreuses vis-à-vis du vainqueur. Du moins reste-t-elle souveraine. (...)

 

Cette politique est la mienne. Les ministres ne sont responsables que devant moi. C'est moi seul que l'histoire jugera. (...)"

 


Au mois d'août 1944, après presque quatre années de collaboration qui est rapidement devenue de la compromission et du déshonneur, quel est le bilan de la politique de collaboration et de ces promesses ?

  • - un pays victime d'un véritable racket humain, économique et financier,
  • - un pays amputé de facto d'une partie de son territoire national,
  • - un pays occupé intégralement par une armée étrangère,
  • - des difficultés toujours plus grandes pour nourrir décemment sa population,
  • - des prisonniers de guerre dont la plupart sont restés 4 ans en détention dans des conditions de vie pénibles et parfois mortelles,
  • - une police et un gouvernement compromis dans le génocide des Juifs et la torture des résistants y compris après que la défaite allemande soit apparue inéluctable,
  • - un pays ayant trahi des étrangers qui ont cru aux traditions d'accueil et d'hospitalité d'une société qui se prétendait civilisée,
  • - un pays qui, sans le général De Gaulle et ses résistants que le Maréchal Pétain a cru bon de pourchasser, y compris jusqu'au mois d'août 1944, aurait été considéré par les Alliés comme un pays hostile et vaincu,
  • - etc.

 

Il ne nous appartient pas de juger les hommes : la France s'en est chargée pour nous.

 

 

http://xtofska.free.fr/marechal_petain.jpg
Le Maréchal Pétain est traduit à partir du 23 juillet 1945 devant la Haute Cour de Justice et doit répondre des accusations d'atteinte à la sûreté de l'État et de haute trahison.

Le 15 août 1945, la Cour déclare, à une voix de majorité, Philippe Pétain coupable, notamment, d'intelligence avec l'ennemi et de haute trahison. Elle le condamne à mort, à l'indignité nationale, à la dégradation nationale et à la confiscation de ses biens. La sentence de peine de mort est assortie du vœu de non-exécution de la peine, en raison de son grand âge (89 ans).

Le 17 août 1945, le Général de Gaulle accomplit le vœu exprimé par la Cour en commuant la peine capitale en peine de réclusion à perpétuité.

Élargi pour raisons médicales le 29 juin 1951, Philippe Pétain décède le 23 juillet 1951.


http://static.howstuffworks.com/gif/russian-army-repels-hitlers-forces-14.jpg

 
Pierre Laval comparait devant le Haute Cour le 4 octobre 1945 après avoir été expulsé d'Espagne où il avait tenté de s'enfuir.

Après un procès excessivement expéditif, Pierre Laval est condamné à mort le 9 octobre 1945 pour intelligence avec l'ennemi et complot contre la sûreté de l'État.

Le 15 octobre 1945 au matin, il tente de se suicider avec du cyanure mais échoue.

Le même jour, il est fusillé à Fresnes.

 

 

 

 

 

 

 


En 2001, André Récipon, fils spirituel de Raoul Follereau et père de Michel Récipon, actuel président de la Fondation Raoul Follereau, écrit dans la revue Le Maréchal de l'Association pour Défendre la Mémoire du Maréchal Pétain :

 

"Laval n'a jamais trahi (...) il est mort assassiné par des balles françaises. Son procès est une monstruosité judiciaire qui entache l'honneur de la France"

 

"Toute sa vie, Raoul Follereau restera fidèle au Maréchal et considérera sa condamnation comme une tache à l'honneur de la France" (voir l'article ici).

 

Outre ses fidélités pétainistes et, aveu encore plus étonnant, ses sympathies pour Pierre Laval "qui n'a jamais trahi", André Récipon n'hésitera pas à affirmer dans ses écrits récents ("Lettre à Hombeline", "Lettre à Mathilde") que le régime de Vichy du Maréchal Pétain constitua le sursaut nécessaire dont la France était privée depuis 1789 ainsi que divers propos sur la loi Gayssot et la dictature d'une pensée unique qui empêcherait de faire éclater la vérité sur l'histoire de la seconde guerre mondiale (ici). L'Histoire jugera. 

 

 

Annexes et documents vidéos

 

 


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Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

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19 juillet 2010 1 19 /07 /juillet /2010 13:17

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 

Nous poursuivons notre contre-enquête relative aux faces cachées de Raoul Follereau.

 

 

Rappels de nos propos antérieurs relatifs à la pensée politique de Raoul Follereau

 

Précédemment, nous avons exposé ici l'attrait, dès les années 1920, de Raoul Follereau pour les idées de Charles Maurras et de l'Action Française.


http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/vignettes/1004122.jpg

  Charles Maurras

 

Nous avons également vu l'intérêt de  Raoul Follereau pour un certain nombre de régimes autoritaires en place dans divers pays d'influence latine d'Europe (ici pour l'Italie de Bénito Mussolini mais aussi l'Espagne de Franco, le Portugal de Salazar) ou d'Amérique du Sud (ici pour l'Argentine de Uriburu, le Brésil de Vargas, ...).



http://www.voyagesphotosmanu.com/Complet/images/franco.jpg

http://www.lessignets.com/signetsdiane/calendrier/images/juillet/29/mussolini_113.jpg

  

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 

 

 

Bénito Mussolini

Franco

 

Nous avons également exposé ici la pensée politique de Raoul Follereau qui se concrétise, en 1927, puisqu'il se dote d'un organe de propagande - la Ligue d'Union Latine - et d'un mensuel dans lequel il peut ainsi diffuser ses idées politique : L'Œuvre latine.

 

Cette Ligue d'Union Latine organise alors des conférences, des pièces de théâtre, des concerts, des voyages en France et à l'étranger dans le but de diffuser les valeurs de la latinité. Nous avons vu ici que Raoul Follereau entend y promouvoir la Foi (dans son acceptation ultramontaine et ultracatholique), l'Amour de la France (à considérer au sens de la "France réelle" - c'est-à-dire blanche, monarchiste et catholique - de Charles Maurras), le Travail, ou la Famille.

 

 

http://mesi07.com.ar/Medallas/M1632.jpg

Médaille non datée de la Ligue d'Union Latine

qui comporte également la mention Fondation Raoul Follereau

 

 

 

Raoul Follereau présente sa démarche comme une réaction rendue nécessaire par la déchéance morale ("perte d'Idéal") de la société française provoquée, selon lui, par les États confédérés de l'Anti-France chers à Charles Maurras : les juifs, les bolcheviques, les étrangers ("métèques" !), les francs-maçons et autres protestants.

Dans ce contexte, nous avons déjà fait allusion aux tendances antisémites de Raoul Follereau dans des articles précédents disponibles ici, ici ou : tant les écrits que les relations de Raoul Follereau nous permettaient de penser que Raoul Follereau avait entretenu des rapports particulièrement ambigus avec l'antisémitisme et ses théoriciens les plus en vue.

 

Nous avons notamment largement exposé les points de convergence qui existaient entre la Ligue d'Union latine de Raoul Follereau et les mouvements d'Union latine du Docteur Jacques Molle qui sévirent en Algérie française à partir du milieu des années 1920.

 

De même, la participation en février 1936 de Raoul Follereau à une conférence d'extrême-droite organisée par le Centre de Documentation et de Propagande et reproduite par le torchon antisémite La libre Parole a été longuement décortiquée par nos soins (ici).

 

 

De nouvelles sources documentaires confirment l'antisémitisme de Raoul Follereau

 

Récemment, de nouvelles sources documentaires nous ont permis de compléter le tableau ainsi initié et d'affirmer de la façon la plus claire que Raoul Follereau, fut, indéniablement, un antisémite convaincu.

 

Dans ses études "L'extrême droite en Oranie (1936-1940)" (disponible ici) puis "Les répercussions de la guerre d'Espagne en Oranie (1936-1939)" (disponible ici), Francis Koerner expose dans quelles mesures la situation politique de l'Oranie s'est crispée à partir des élections municipales de 1934, puis législatives en 1936.

 

De ce fait, la vie politique et sociale de l'Oranie s'est fortement polarisée entre, d'une part, les partisans du Front Populaire et, plus généralement, d'une gauche républicaine et, d'autre part, une droite conservatrice, volontiers franquiste et tentée par ses extrêmes fascisantes - suivant le modèle mussolinien - et antisémites.

 

De façon générale, l'auteur expose la dimension sacrée acquise par la guerre civile espagnole au yeux des ligues d'extrême droite française dont fait partie la Ligue d'Union Latine de Raoul Follereau. Il s'agit pour leurs membres d'une véritable guerre sainte dans laquelle le régime fasciste est présenté comme le seul rempart efficace contre l'expansion du judéo-bolchevisme.

 

Dans ces deux publications, Francis Koerner prend le soin de citer Raoul Follereau comme un acteur important de la vie de l'extrême-droite locale (Unions latines et Amitiés latines) tant par les conférences qu'il y tient que par les collectes qu'il organise afin de soutenir financièrement les nationalistes espagnols de Franco, officiellement pour y financer la reconstruction des églises catholiques ravagées par les républicains ou encore, divers voyages de propagande.

 

Nous trouvons une illustration de cet investissement de Raoul Follereau auprès de l'extrême-droite de cette partie de l'Algérie française dans L'Écho de Tiaret, un quotidien local dont nous avons retrouvé deux numéros de décembre 1936.

 

 

Raoul Follereau dans L'Écho de Tiaret

 

http://gallica.bnf.fr/RequestDigitalElement?O=NUMM-5673787&E=PNG&Deb=1&Fin=1&Param=DDans le numéro daté samedi 5 décembre 1936 (lien ici), le journal recommande plus que chaudement une conférence de Raoul Follereau organisé par le Rassemblement National d'Action Sociale :

 

"Monsieur Follereau, Président Général des Unions Latines (...) a entrepris la grande croisade contre tout ce qui est Anti-France. Mais Monsieur Follereau fait plus et mieux que combattre, il persuade. Aller l'écouter représente pour vous un devoir. L'entendre sera pour nous une joie et une récompense".

 

Rappelons que le Rassemblement National d'Action Sociale est un groupement fondé par l'ex-Abbé Lambert, un prêtre déchu par son évêque, destiné à rassembler tout ce que l'Oranie compte de sympathisants nationalistes, antisémites et d'extrême-droite. Ses actions et démonstrations de force atteignent une telle violence que les comités locaux du Front Populaire en arrivent à craindre une sédition et une guerre civile à l'image de la voisine espagnole :

 

"Considérant l'activité illicite et dangereuse du Rassemblement dit National, et, en particulier, des Unions latines de Sidi-Bel-Abbès, organismes calqués sur des ligues dissoutes ayant fait des démonstrations en armes ; estime qu'une lutte de tous les instants doit être menée contre le fascisme ; demande en outre avec insistance au gouvernement du Front Populaire afin de parer au danger de sédition possible, d'envisager sans le moindre délai (...) l'armement des masses populaires pour le jour du déclenchement éventuel du Coup d'État fasciste" (Le Semeur, 23 août 1936, cité par Francis Koerner dans Les répercussions de la guerre d'Espagne e n Oranie, page 479).

 

Rappelons que les Unions Latines dont Raoul Follereau est présenté ci-dessus comme étant le président furent créées dix ans plus tôt par le Docteur Jacques Molle, antisémite notoire qui se revendiquait ouvertement de l'antisémitisme des nazis. D'ailleurs, son journal de propagande, Le Petit Oranais, comportait en première page de couverture la svastika, autrement dit, le symbole du parti nazi (source ici).

 

Rappelons enfin que cette violence n'est d'ailleurs pas absente des passages en Algérie de Raoul Follereau. Déjà, en juillet 1936, le quotidien catholique de métropole La Croix relatait des affrontements et des coups de feu à l'issue d'une conférence de Raoul Follereau à Mostaganem, en Algérie française (édition du 03/07/1936 disponible ici).

 

http://gallica.bnf.fr/RequestDigitalElement?O=NUMM-5673788&E=PNG&Deb=2&Fin=2&Param=DDans le numéro du 12 décembre 1936 (lien ici ou cliquer sur l'image à droite), c'est un compte rendu circonstancié de la conférence de Raoul Follereau que le journal L'Écho de Tiaret publie à l'attention de ses lecteurs.

 

Raoul Follereau y dénonce "ces oiseaux de proie" venus "s'abattre sur la France". Follereau continue ainsi : "Par oiseaux de proie, je nomme ces financiers internationaux qui sont de partout et de nulle part et dont le porte-monnaie remplace le cœur et qui forment la société du Komintern".

 

Raoul Follereau leur reproche de s'être, dès novembre 1918, livrés à des "intrigues diaboliques" pour "nous diviser" et "créer la haine entre nous". Il leur reproche également d'avoir fait la conquête de la Russie et de s'être accaparé, durant la grande guerre, "de toute l'industrie et le commerce".

 

La terminologie "ces financiers internationaux qui sont de partout et de nulle part" ne trompe pas. Les concepts de "peuple apatride", de "finance internationale" ou de "capitaux anonymes et vagabonds" désignent très clairement, et sans aucun doute possible, le Juif.


Associé à la "société du Komintern", nous obtenons ici une exemplaire démonstration du complot judéo-bolchevique selon lequel, pour l'extrême-droite, la révolution bolchévique est la première étape - locale - d'un vaste complot où Juifs et Marxistes marchent main dans la main pour la mise en œuvre de la domination juive internationale.

 

Profitons-en pour rappeler ici que Maurras considérait, pour sa part, que le premier danger qui menaçait la France était le "marxisme judéomoscoutaire" (Maurras, Mes idées politiques, cité par Ariane Chebel d'Appolonia dans Extrême-droite en France, volume 1, page 91, aux éditions Complexe).

 

Il apparait donc clairement, une fois de plus, que Raoul Follereau était porté par des convictions politiques ultraradicales et antisémites.

 

Dans un article ultérieur, nous verrons dans quelle mesure Raoul Follereau puis la Fondation éponyme ont utilisé sa notoriété acquise auprès des lépreux pour tenter d'effacer toute cette période de sa vie.

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 

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12 juillet 2010 1 12 /07 /juillet /2010 08:37

 

Prologue : attention, cet article date de l'été 2010.

Depuis le 18 décembre 2010, la fiche Wikipédia Raoul Follereau a été censurée.

Nous vous invitons à lire cet article :

"à wikipedia la "neutralité" sert à protéger les idées d'extrême-droite et fascistes"



 

 

http://philanthropie.files.wordpress.com/2009/01/wikipedia-logo.jpg

Nous avons eu la surprise de constater ce week-end que la fiche Wikipédia de Raoul Follereau a été "reprise en main" ces derniers jours.

 

En effet, depuis que nos articles sont publiés sur notre blog, ainsi que sur Agoravox (notre fiche auteur, ici), la fiche Wikipédia de Raoul Follereau avait été retravaillée (voir ici et son historique ).

 

À ce jour, la Fondation Raoul Follereau n'a jamais cherché à entrer en contact avec nous ; jamais officiellement, sous une étiquette clairement annoncée, en tous cas.

 

Or, tout récemment, un utilisateur Wikipédia nommé " comfrf " est intervenu sur Wikipédia pour y apporter la bonne parole officielle concernant Raoul Follereau.

 

http://supertadeboulogne.mejistes.fr/images/blogs/3253.jpgNous sommes bien entendu tentés de considérer que ce COMFRF représente le Service COMmunication de la Fondation Raoul Follereau.

 

FRF est en effet, le sigle habituellement utilisé pour désigner la Fondation Raoul Follereau. Le préfixe COM n'a pas besoin d'être commenté.

 

En outre, ces ajouts sont emprunts d'apologitisme le plus manifeste. D'ailleurs, une responsable de Wikipédia s'est empressée de signaler la dimension publicitaire et promotionnelle que prenait dorénavant la fiche de Raoul Follereau.

 

L'origine de ces modifications ne laisse donc guère de doutes.

 

Néanmoins, malgré ces défauts à propos desquels nous apporterons notre réflexion en temps utile, nous nous réjouissons de constater que les apports antérieurs relatifs au passé fascisant et antisémite de Raoul Follereau issus de nos travaux de recherche ont été laissés en l'état.

 

Si cette situation devait perdurer, il nous plairait de croire que la Fondation Raoul Follereau accepte de regarder la vérité historique en face et de l'assumer. En effet, la motivation de notre humble blog n'est pas de nuire à qui que ce soit mais réside dans la quête de Vérité et de Transparence.

 

Si cette quête de Vérité et de Transparence devait être partagée par la Fondation Raoul Follereau elle-même, nous ne pourrions que nous en réjouir et l'en féliciter.

 

L'avenir dira si notre sentiment d'aujourd'hui est pertinent dans la durée.

 

Nous en profitons pour remercier les personnes qui nous contactent via ce blog pour partager avec nous leur sentiment sur Raoul Follereau, sur la Fondation Raoul Follereau et les méthodes de gestion qui y sont mises en œuvre.

Pour des raisons juridiques évidentes, tout ce qui nous est transmis n'est pas forcément exploitable en l'état, mais nous tenons à vous dire combien cela nous nous est utile pour mieux comprendre les enjeux et les comportements passés ou présents de certains.

 

Notre enquête/quête continue !

 

 

 

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

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15 juin 2010 2 15 /06 /juin /2010 22:17

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 


Nous poursuivons nos travaux sur les facettes cachées de la Ligue d’Union Latine fondée par Raoul Follereau en 1927 (notre article précédent est lisible ici).

Rappelons que, selon la Fondation Raoul Follereau, cette Ligue avait pour objectif de publier et d’éditer des auteurs de théâtre ou de poésie et, plus généralement, d’œuvrer pour la paix dans le monde.


Pourtant, dans la première partie de notre article qui se trouve ici, nous avons souligné au moins quatre points de convergence entre Raoul Follereau et Jules Molle, fondateur d’un groupement antisémite intitulé Ligue latine, puis Union latine, ainsi que Henry Coston et Henri-Robert Petit, tous deux candidats aux élections législatives d’avril 1936 sous l’étiquette « candidats antijuifs d’Union Latine ». Quelques semaines plus tôt, ces deux individus - entre autres antisémites notoires - avaient partagé la tribune avec Raoul Follereau lors d’une conférence de propagande antisémite (voir notre article sur ce sujet ici).

Dans sa biographie (Raoul Follereau, Hier et aujourd’hui, Fayard, 1992, p. 43) Étienne Thévenin identifie les trois influences qui caractérisent Raoul Follereau :

- le catholicisme intégral et ultramontain (autrement dit, la primauté du spirituel sur le temporel, c'est à dire la primauté du Vatican sur la IIIème République) ;
- l’Action française de Charles Maurras au contact duquel Raoul Follereau se serait forgé “une certaine idée de la France” (reprise anachronique et assez peu heureuse, de notre point de vue, des mémoires de De Gaulle quand on sait l'animosité que Raoul Follereau et André Récipon, son fils spirituel, vouaient à l'égard du Général) ;
- la latinité, compendium du classicisme, de l’esthétique et des valeurs de l’antiquité gréco-romaine.
 

 

Lorsque, début 1927, Raoul Follereau fonde la Ligue d’Union latine, il entend promouvoir ses idées afin de « défendre la civilisation chrétienne contre tous les paganismes et toutes les barbaries ». Il entend « unir et fédérer les élites latines pour la défense et la gloire de leur civilisation » et veut travailler pour un « relèvement moral du monde » (dixit Thévenin).

 

Nous allons examiner cette doctrine dans trois textes fondateurs que nous a laissés Raoul Follereau. Les versions dont nous disposons sont celles que la Fondation Raoul Follereau a éditées en 2002 pour le centenaire de la naissance de Raoul Follereau (Œuvres complètes de Raoul Follereau, éditions Fondation Raoul Follereau, 2002) :



1 - Faudra-t-il arracher les cordes de la lyre ? (1930) (cité ci-après sous la forme Faudra-t-il ... p.00)


Il s’agit d’une conférence que Raoul Follereau tiendra à de très nombreuses reprises, y compris à l’étranger. Le texte dont nous disposons semble être celui de la conférence qui se serait tenue dans une des salles de la Sorbonne, le 6 mars 1930.



2 - Le sourire de la France (1930) (cité ci-après sous la forme Le sourire ... p.00)


Il s’agit d’une conférence que Raoul Follereau organisa en octobre 1930 afin de financer un voyage en Amérique du Sud, et plus particulièrement en Argentine. Il semble y disposer d'un certain nombre de réseaux susceptibles de l'accueillir et de lui réserver le meilleur accueil. Ce voyage avait deux objectifs : officiellement, Raoul Follereau aurait été chargé par le Ministre de l'Instruction de l'époque de réaliser une étude sur les raisons de l’influence française en Amérique du Sud. Raoul Follereau en profite pour y  tenir un cycle de conférences Faudra-t-il arracher les cordes de la lyre ? à destination des communautés et élites francophones locales.

Cependant, le choix de l’Amérique du Sud n’est pas anodin. Nous allons vous exposer pourquoi.

Après la première guerre mondiale, l’audience de l’extrême-droite française et de l’intégrisme catholique s’y développe massivement. C’est ce que nous pouvons lire ici : « Il y a eu des liens entre l’extrême droite française et l’Argentine depuis les années 1930. L’intégrisme catholique français a joué un rôle très important dans l’exportation de la doctrine française, en lui fournissant une base idéologique, notamment par le biais de la dénommée « Cité catholique ». Celle-ci fut créée par Jean Ousset, un ex-secrétaire de Charles Maurras, qui a été l’un des leaders de l’extrême droite en France. ». Également, un certain abbé Julio Meinvielle, prêtre ultracatholique et antisémite virulent, s’illustre particulièrement. Helgio Trindade fait le même constat en introduction de son article La question du fascisme en Amérique du Sud (article disponible ici), désignant, notamment, l'Argentine, le Brésil, la Bolivie, le Mexique ou encore le Chili.


Rappelons que Raoul Follereau est un fervent partisan des régimes autoritaires comme le régime fasciste italien de Mussolini (article ici) ou divers régimes autoritaires tel l’État nouveau ultracatholique du portugais Salazar (article ici).


Or, certains pays d’Amérique du Sud sont justement agités de soubresauts militaires et ultranationalistes : par exemple, José Félix Uriburu, un militaire argentin, prend le pouvoir en Argentine par un coup d’état début septembre 1930, soit quelques semaines avant le départ de Raoul Follereau, et établit un régime dictatorial, premier d'une série que l'histoire argentine retient sous la dénomination Décennie infâme.

Au Brésil, où Raoul Follereau se rendra également au cours de ce voyage, le régime politique est profondément instable. En mars 1930, Getúlio Vargas perd les élections présidentielles. Lui et ses partisans contestent alors ces résultats et fomentent des troubles qui aboutissent, le 3 octobre 1930, à une Révolution et à l'instauration, le 3 novembre qui suit, d’un régime autoritaire.

Raoul Follereau fait discrètement allusion à ces évolutions politiques pour s'en réjouir : « Notre rêve de toujours était d’aller en Amérique Latine, là où l’immortel esprit, dégagé un peu des vieilles doctrines, s’est affiné et exalté dans un sang nouveau » (Le sourire ... p. 80).

 

Dernier "détail" que nous prenons le soin de préciser : ces deux pays dans lesquels Raoul Follereau prend un plaisir manifeste à se rendre conserveront longtemps un attitude ambigüe face au conflit qui oppose les pays de l'Axe Rome-Berlin aux Alliés : le Brésil restera neutre jusqu'en 1943 et l'Argentine jusqu'en 1945. Et ce n'est pas non plus un hasard si une grande partie des dignitaires nazis trouvera refuge, au sortir de la seconde guerre, en Argentine, au Paraguay ou encore au Brésil, bénéficiant sur place de sympathies quasi-officielles.

 



3 - La Trahison de l’intelligence (1936) (cité ci-après sous la forme La Trahison ... p.00)

 

Cet ouvrage, édité en 1936, fut, de l'aveu même de son auteur, un échec éditorial. Raoul Follereau y développe une critique acerbe des mœurs idéologiques et philosophiques de son époque.



http://www.kuleuven.be/thomas/images/algemeen/actualiteit/dossiers/damiaan/infoblokken/Infoblok_16/Raoul%20Follereau.jpg 


 

Pour la suite de notre exposé, nous allons décomposer notre propos en quelques phrases clés qui seront étayées d'extraits et de citations tirés des œuvres de Raoul Follereau.



A. Raoul Follereau développe des concepts artistiques classiques et ultraconservateurs. Il condamne avec virulence la plupart des nouvelles formes d'expression artistique


« notre intention première est de ne point rompre avec la tradition. Nous ne sommes pas révolutionnaires et nous n’aimons pas ce mot. » (Faudra-t-il ... p. 34 ; Le sourire ... p. 72)

Raoul Follereau s’insurge contre les « excès cubistes, dadaïstes ou autres qui seront la risée de nos petits-enfants. "Originaux, personnels, audacieux", dit-on autour de nous. "Ignorants, ignorants, ignorants" répond déjà l’écho. Ces gens-là peignent sans savoir, sculptent sans savoir, écrivent sans savoir, composent sans savoir. Leur prétendue audace masque leur impuissance. (…) Que (les) parodies ridicules (de ces cerveaux malades ou facétieux) aient pu – un instant – soutenir l’attention des hommes, causera un fou rire inextinguible à la postérité » (Le sourire ... p. 67)

« le snobisme qui a poussé, ces dernières années surtout, tant de natures généreusement douées à produire des œuvres absconses pour le sadique plaisir de faire du neuf à tout prix et pour épater le populo est un des produits les plus répugnants de la bêtise humaine » (émission de radio du 20.11.1932 citée par Thévenin p.56)

« Plus de charabia, plus de jargon dit : artistique. Plus de théorèmes absurdes de pensées, tels sous le signe de Freud ou de quelque autre esprit, brillant sans doute, mais très nuisible, et qui donnent lieu à des digressions de trois heures d’épouvantable ennui, qu’on appelle le théâtre moderne » (Le sourire ... p.70)



B. Raoul Follereau se réjouit d'Hugo, Musset ou Lamartine, mais il condamne les excès du romantisme


« Nous n’avaliserons pas ce mouvement dans son entier (le romantisme), à cause de ses excès, justement, parce que parfois le règne du cœur a tourné au règne du vermouth cassis, parce que nous n’avons pas d’estime spéciale ni d’admiration spontanée pour les filles publiques, et que nous voulons toujours raison garder (…). De même que nous ne voyons pas l’utilité première d’élever des statues aux alcooliques ou aux noceurs, nous ne tirons aucune gloire d’être poitrinaire, et fuirons, comme il convient, cette horrible dignité » (Faudra-t-il ... p. 35)



C. Pour Raoul Follereau, l’art, et donc l’artiste, a une fonction politique et idéologique


« le poète a à remplir un rôle éminent et grave, il est, en quelque sorte, et plus que tous les hommes d’action, un conducteur, un chef, un guide d’âme » (Faudra-t-il ... p. 37)


Il faut rapprocher cela des conceptions institutionnelles de Raoul Follereau selon lesquelles la nation doit être dirigée, non par le peuple ou ses représentants, mais par des élites (voir paragraphe J du présent article).



D. Raoul Follereau diagnostique et dénonce une « crise d’Idéal » de la société française

« un peuple (…) triste d’un ennui qui paraissait incurable. (…) la jeunesse ne rit plus (…) la jeunesse est pensive, agitée, inquiète. (…) il manque quelque chose à ces jeunes gens. (…) Ce quelque chose, c’est l’Idéal. » (Le sourire ... p. 63)


E. Raoul Follereau analyse cette « crise d’Idéal » comme la conséquence de la laïcisation de la France et de la perte du sens de la Patrie


« l’homme n’aura pas, n’aura jamais de bonheur, s’il ne le cherche au dessus de lui. (…) c’est d’en haut que vient la lumière et la paix et la joie »  (Faudra-t-il ... p. 40)

« Dieu est une nécessité philosophique qu’on ne saurait honnêtement écarter »  (La trahison ... p. 106)

« La Société, en se privant volontairement du secours de Dieu, est incapable, sauf par la force, de maîtriser l’individu » (La trahison ... p. 101)

« la science et l’humanité sont devenues des dieux nouveaux (…) des dieux civils (…) des dieux tristes, on a cru pouvoir faire un bonheur laïque » (Faudra-t-il ... p. 39)

« Au nom delà science, du progrès, de l’humanité, on a arraché de nos cœurs l’idée de Dieu ; on est en train de nous anesthésier l’amour de la Patrie » (Faudra-t-il ... p. 38)


« L’ordre de Lénine, ce Moïse rouge, était clair (…) : détruire les deux forces qui, dans chaque individu, offrent la plus grande résistance, (…) la FOI et le PATRIOTISME » (La trahison ... p. 151)

« le bolchevisme s’est attaché à ruiner dans l’esprit de chacun la notion naturelle, sainte et sacrée du patriotisme. Ainsi sont nés ce pacifisme, ces objections de conscience, toutes ces idéologies pitoyables et meurtrières qui trouvèrent trop fréquemment des oreilles et des cœurs complaisants » (La trahison ... p. 152)


F. Raoul Follereau déplore qu'une « crise de conscience morale » découle naturellement de cette « crise d’Idéal »


Raoul Follereau dénonce une « crise d’apathie morale, de jouissance matérielle », « l’envie de vivre et de jouir immédiatement » (Le sourire ... p. 63)

« On est arrivé à un égoïsme cruel, à un cynisme inconscient, à des plaisirs sans joie. Nulle part on n’a trouvé le bonheur. Parce que le bonheur est partir avec les grandes idées mortes ».  (Faudra-t-il ... p. 39)

 « Nous nous dressons contre toutes les anarchies mentales, contre toutes les dissolutions de mœurs aussi, notre position sera violente contre la pornographie » (Le sourire ... p. 72)


La pornographie « est, avant tout sombre, bête et stupide, bête et bestiale et malpropre au sens physique du mot. Elle nous fait horreur et plus encore, elle nous dégoûte parce qu’elle est la plus avilissante anarchie » (Le sourire ... p. 73)


« Ceux qui, dans des buts de lucre, font un commerce éhonté de basse pornographie, flattant pour atteindre au gros tirages les appétits les plus vifs, sèment ainsi dans les jeunes âmes les poisons abominables et font enfin à notre pays un tort immense et parfois irréparable. La position que j’occupe parmi les jeunes poètes, mes collaborateurs et mes amis, m’a permis de dénombrer les tragédies domestiques et les drames spirituels causés par cette absinthe de voyou » (émission de radio du 20.11.1932 citée par Thévenin p.57)

« Il paraît qu’on ne peut légalement rien contre ces commerçants qui s’enrichissent aux dépens de la santé morale de la patrie » (Le sourire ... p. 83)

 

« Notre œuvre de clarté (…) sera en même temps une œuvre d’hygiène, de salubrité morale » (Le sourire ... p. 73)


Pour Raoul Follereau, la nationalité française est nécessairement liée à une communauté de pensée avec la sienne :

« (...) Paris n’est pas toujours en France »   (Faudra-t-il ... p. 50 ; Le sourire ... p. 79)

« Nous sommes français et c’est tout dire. Mais la pornographie, elle, n’est pas française. » (Le sourire ... p. 73)


Raoul Follereau considère que ces crises (d’Idéal et, subséquemment, morale) « entravent le développement et l’essor de la pensée humaine » (Le sourire ... p. 68)

« Crise d’idéal, crise de conscience morale ont douloureusement étreint les cerveaux » (Le sourire ... p. 85)



G. Face à cette situation, Raoul Follereau préconise LA solution : la latinité.


« c’est (…) un remède philosophique qui est nécessaire (…). Nous croyons trouver ce remède (…) dans un réveil de l’esprit latin. » (Le sourire ... p. 68)

« il y a donc possibilité certaine, en face de l’anarchie qui monte et de la dissolution des énergies et des mœurs, de recréer cet esprit latin » (Le sourire ... p. 70)


H. Raoul Follereau tombe dans l'ethnocentrisme autour de la civilisation latino-catholique


« Il est d’évidence que la latinité (…) est le suprême formule de la civilisation ; que rien, sans elle ne fut constructif, qu’elle fut la mère naturelle ou d’adoption des plus grands génies et que les plus grands chefs d’œuvres naquirent à son ombre » (Le sourire ... p. 68)


« Qu’on le veuille ou non, aucune autre forme d’esprit, si séduisante soit-elle d’abord, n’a tellement bâti pour l’avenir. La plupart des thèses (et des exemples récents sont là qui nous éclairent) furent destructrices, ce qui est facile, mais ne surent point refaire la maison du bonheur » (Le sourire ... p. 68)

« Nous voulons défendre cette culture et cette civilisation à laquelle la France doit sa grandeur et sa magnificence, (…) le plus pur et le plus beau flambeau qui ait jamais brillé sur le monde » (Le sourire ... p. 78)

« La France (…) trouvera en cette action latine l’occasion d’être, une fois de plus, à la tête des peuples » (Le sourire ... p. 83)

« Faire revivre l’esprit latin, (…) c’est redonner à la France un titre nouveau à la royauté spirituelle du monde » (Le sourire ... p. 84)



I. Pour Raoul Follereau, la latinité, c’est avant tout l’ordre, la clarté, la discipline


« on peut, à notre sens, la définir (la latinité) d’un seul mot : ordre. L’ordre est sa marque dominante, son caractère essentiel. Il est la raison d’être de sa pérennité. (…) il est aussi ce qui manque le plus au monde de l’après-guerre » (Le sourire ... p. 70 ; La trahison ... p. 146)

« L’Ordre, c’est la clarté et la discipline » (La trahison ... p. 147)


Les produits de l’esprit latin sont « (…) hiérarchie, ordre, clarté et vertus morales : désintéressement, dévouement (…) » (La trahison ... p. 123)

Raoul Follereau n'hésite pas à faire preuve de manichéisme : « Il faut le dire, le répéter et le redire encore : (…) tout, au monde de la pensée, va à ces deux pôles d’attraction et se résorbe enfin en ces deux éléments naturels : l’ordre et l’anarchie » (Le sourire ... p. 74 ; La trahison ... p. 151)


Entre ordre et anarchie, aucun compromis n’est possible : la faillite morale de la société française de l'époque de Raoul Follereau « pouvait se prévoir. Elle s’annonça longtemps à l’avance. » / « Depuis des générations (…) on s’est acheminé vers ce renoncement. » / « On s’est englué dans des formules neutres, embourbé dans des habitudes lâches, dans les gestes convenus, les paroles apprises. » / « Du rite des religions (…) les civilisations desséchées ont fait des manuels de savoir-vivre et de maintien. » / «Les bien-pensants sont devenus des rien-pensants. Au lieu d’être charitables, ils sont devenus modérés, libéraux, comme si la vérité supportait un marchandage, un compromis ou une atténuation. Sous prétexte de concilier, ils ont déserté, ils ont renié. » (La trahison ... p. 94)


La conséquence de la tiédeur des modérés et des bien-pensants, c'est l'anarchie et donc, le bolchevisme : « La plus récente création politique née de ces erreurs et de ces malheurs, c’est le bolchevisme (…) » (La trahison ... p. 94)

« Ce qu’il importe donc, c’est de donner au monde un certain nombre de principes d’ordre, de clarté et de justice qui puissent être communs (…). Sinon, on va à l’anarchie. Et l’anarchie porte aujourd’hui un nom social : le bolchevisme » (La trahison ... p. 150)

« Les heures qui passent aggravent et précisent le tragique dilemme où se débat le monde : Ordre ou anarchie, civilisation ou barbarie, chrétienté ou bolchevisme. Il n’est plus possible de tergiverser, d’échafauder des compromis médiocres et lâches, il faut choisir, il faut décider » (La trahison ... p. 151)

Outre Dieu et la Patrie, la Ligue d’Union Latine défend également la Famille et le Travail :

« Pro aris et focis : pour la famille, temple et gardienne des nations, pour le travail et toutes ses saines joies (…), pour ce que donnent, plus fort que tous les forts du monde, la Foi et l’Idéal, (…) nous vous appelons au travail » (Le sourire ... p. 75 ; La trahison ... p. 151)

Dix ans plus tard, le régime de Vichy du Maréchal Pétain abandonnera la devise Égalité, Liberté, Fraternité pour adopter celui de Travail, Famille Patrie, exauçant ainsi les vœux de Raoul Follereau.

Pour Raoul Follereau, la latinité, c’est le juste équilibre entre le bolchevisme qui est la négation de l’individu au profit de la Communauté, la philosophie germanique, initiée (selon Raoul Follereau) par Luther, qui est l’hypertrophie de l’individu au détriment de la Communauté et la philosophie anglo-saxonne qui pêche par manque de cohérence et de clarté (longs développements dans La trahison ... )

 


 J. Raoul Follereau dénonce les acquis de la Révolution Française de 1789 qui, selon lui, mènent droit au désordre et, donc, au communisme, cette « nouvelle géhenne » (géhenne : terme biblique désignant un lieu de tortures et d’abominations, l’Enfer).

 

« On saisit immédiatement que notre position définitive, en ces trois termes, ORDRE, CLARTE, DISCIPLINE, est essentiellement anti-révolutionnaire » (Le sourire ... p. 72)

« Il faut battre en brèche les théories généreuses au premier abord et cruelles quant au fond, qui forment la base même de rêves trop faciles. Les hommes ne naissent pas égaux ; ils ne le deviennent, ni ne le demeurent. » (Le sourire ... p. 71 ; La trahison ... p. 147)

« Que la société leur reconnaisse autant de droits à être heureux, évidemment ! Mais le bonheur n’est pas une chose simple, et tous les chemins qui y mènent n’ont pas les mêmes fleurs » (Le sourire ... p. 71 ; La trahison ... p. 147)

« La Liberté a supprimé les libertés.
L’Égalité a engendré la médiocrité.
La Fraternité, depuis cent cinquante ans qu’on la proclame sur les mairies de France, a vu passer quatre révolutions, une bonne douzaine de guerre, d’innombrables émeutes et grèves de toutes sortes
 » (La trahison ... p. 92)

 
Raoul Follereau considère qu’une nation doit être menée par une élite : « La nécessité d’une élite est pour une nation une question capitale. Le pays doit penser par elle, et vouloir par elle. (…) Le cerveau d’un peuple est nécessaire, mais il ne doit pas tenir le corps tout entier. Une planète de penseurs mourrait de faim » (Le sourire ... p. 71 ; (La trahison ... p. 106)
  

« L’individualisme sentimental d’un Jean-Jacques Rousseau n’est pas seulement une lourde utopie, mais un danger public » (La trahison ... p. 123)

« On ne peut que sourire en songeant que c’est au nom de la liberté que fut élevée cette nouvelle géhenne (le communisme). Et que la fameuse Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen a servi de fondation à cette prison modèle » (La trahison ... p. 96)

Pour Raoul Follereau, le communisme n’est que l’étape finale d’un long processus de décomposition intellectuelle, conséquence directe des crises d’Idéal et morale qu’il dénonce (voir ci-dessus les § D, E et F) : « Il faut le dire. Si le bolchevisme a pu parfois provoquer ses ravages, c’est qu’il a trouvé devant lui des âmes en état de moindre résistance, des âmes anémiées, énervées par un siècle de sot positivisme et de matérialisme stérile et décevant. Le bolchevisme n’est que la hyène qui achève l’agonisant pour se repaître du cadavre. Les assassins de l’homme sont de plus ancienne lignée. » (La trahison ... p. 103).

 

« (…) jamais peut-être, de plus grands dangers n’ont menacé l’âme profonde des peuples. Trompés, endormis (…), les esprits ont insensiblement dévié de la route logique et naturelle de l’Ordre. (…) Des germes sournois, au masque de généreuses idéologies, s’y sont infiltrés et fermentent gravement. Faire revivre l’esprit latin, c’est dissiper ces miasmes et ces malaises (…) » (Le sourire ... p. 84)


Quand on connait les écrits de Raoul Follereau, sa filiation intellectuelle revendiquée avec Charles Maurras , père de l'antisémitisme d'État, et ses fréquentations antisémites (tels Coston, Petit ou Darquier de Pellepoix, etc.) on peut comprendre que ces deux formulations « Les assassins de l'homme sont de plus ancienne lignée » et « des germes sournois, au masque de généreuses idéologies s'y sont infiltrés » est une allusion à peine voilée aux juifs, aux francs-maçons, aux communistes, brefs, aux agents de l'Anti-France ...

 


K. Raoul Follereau croit en la « France réelle » de Charles Maurras et dénonce les ennemis de l’intérieur, ces agents de l’Anti-France : les étrangers, les Juifs, les protestants, les communistes, le régime républicain et parlementaire, etc.


« J’ai cité Freud, j’eus peu en citer d’autres. Je n’ai rien contre cet étranger, sinon qu’il est étranger, et dangereux comme tel » (Le sourire ... p. 70)

Raoul Follereau dénonce la pensée germanique comme barbare et guerrière. Il l'explique par le fait que Luther en serait le père fondateur, auteur d’un « schisme » d’avec l’esprit latin.

« Les caractéristiques du Barbare ainsi définies sont celles de la philosophie germanique toute entière. Le Germanisme (…) est né d’une révolte. Il est né de l’insurrection d’un individu contre le pouvoir établi ; son père est Luther et son premier acte fut la destruction de la Bulle du pape romain. (…) L’esprit germain, né d’une révolte, ne peut vivre que de la révolte et de la violence. » (La trahison ... p. 116)

Selon Raoul Follereau qui reprend, une fois encore, les idées de Charles Maurras, « l’hypertrophie du moi » constatée chez les philosophes allemands trouverait sa source dans la Réforme de Luther et conduit directement à l’anarchie. (La trahison ... p. 114)

« (…), admettre Luther, c’est attendre Lénine » (Le sourire ... p. 74)

En parlant des auteurs sud-américains d'influence latine, Raoul Follereau dit : « Les Français n’ont que trop souvent de sourire pour les littératures étrangères, j’entends par là étrangères à notre civilisation. Par peur de ne point paraître assez large d’esprit, assez libéral, assez éclectique, on se viole les méninges pour essayer d’admettre telle littérature nordique, germanique voire depuis quelques mois, soviétique. Pendant ce temps, paraissent en des pays amis, des livres qui sont près de nous, qui sont l’illustration et la défense de notre race (…). » (Le sourire ... p. 82)

« les conflits maintenant sont moins de nations que de races » (Le sourire ... p. 74)
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/45/Dietrich_Eckart_01.jpg
Dans son livre Les lois antireligieuses de 1904 trahissent la France, Raoul Follereau parle des juifs comme d’une « race toute puissante » en Allemagne. (Raoul Follereau, Les livres p. 43)

« Lénine, ce Moïse rouge » (La trahison ... p. 152) Allusion explicite au complot judéo-bolchevique cher à l’extrême droite française de l’entre-deux-guerres. L’association de Moïse et de Lénine remonte à un ouvrage de Dietrich Eckart (photo à droite), antisémite notoire, complice d’Hitler lors du putsch de 1923 et auteur du livre Le Bolchevisme de Moïse à Lénine.
 

  

L. Raoul Follereau conçoit l’Art comme un outil de propagande au service d’une idéologie


« nous sommes sur le point de réaliser notre premier film : (…). On sait aussi le pouvoir inouï de diffusion de ce nouveau mode d’art, et combien il saura être utile à une juste cause »  (Faudra-t-il ... p. 45 ; Le sourire ... p. 77)

« cette œuvre d’union latine et de propagande française, nous la poursuivrons, nous la poursuivrons par tous les moyens »  (Faudra-t-il ... p. 49) 

« Nous croyons aussi que c’est par l’Art qu’on donnera le premier sens esthétique et moral à la foule » (Le sourire ... p. 73

« Il nous appartient (aux poètes et artistes) de redonner au monde ce goût de l’idéal »  (Faudra-t-il ... p. 43) 

Pour Raoul Follereau, seules comptent « non pas les pas redoublés médiocres ou les valses faciles d’un répertoire sans art comme sans âme, mais les œuvres ayant une portée artistique et un sens moral (…) » (Le sourire ... p. 73)

L’Art doit être le moyen de « régénérer » le public.

 

« La Ligue d’Union latine a donné, tant à Paris qu’en Province et à l’étranger, deux cents représentations de bon, sain et utile théâtre » (Le sourire ... p. 76)

   


M. Récurrence de la blancheur


Dans ces citations, Raoul Follereau décline une obsession pour la blancheur.

 

Fernand Gregh « est celui, qui, lourd d’une immense talent, n’a jamais descendu, abaissé son art, prostitué la haute pensée dont il est l’écho à d’obscures fins de succès ou d’argent ; il est celui qui a préféré la gloire pure de l’élite, le bonheur blanc d’avoir vécu tranquille avec lui-même à tous les succès avilissants, aux applaudissements de cour, aux richesses démagogiques » (Faudra-t-il ... p. 34) 

« pour cela (…) nous travaillerons sans relâche, dans l’enthousiasme et dans la joie. À défaut d’audace, nous aurons la Foi, invincible et sûre, et la sérénité d’un passé blanc » (Faudra-t-il ... p. 43) 
 
« tendons nous les mains, nos mains loyales et blanches » (Faudra-t-il ... p. 44) 
 
« non jamais, sur aucune des routes blanches de son histoire, la France ne fut plus belle, plus forte ni meilleure » (Le sourire ... p. 62)

« C’est par notre pensée latine que nous ferons le destin blanc de nos patries (…) » (Le sourire ... p. 73 ; La Trahison ...  p. 150)

« Deux routes s’offrent à vous, jeunesse. Il faut savoir choisir, (…) et (…) prendre la route blanche et dorée qui vit les sandales d’un Virgile et le grand chapeau de Mistral » (Le sourire ... p. 75)

« Pro aris et focis : pour la famille, temple et gardienne des nations, pour le travail et toutes ses saines joies, pour le bonheur d’une conscience blanche (…) » (Le sourire ... p. 75)

« Alors la statue blanche (la France) sourira » (Le sourire ... p. 84)

 


N. Quelques noms glanés sur internet


Qu'il s'agisse de la Ligue d'Union latine ou de la Jeune Académie dont elle prend la suite, nous avons trouvé sur internet quelques liens intéressants qui alimentent notre réflexion et qui confirment la tonalité politique de l'œuvre de Raoul Follereau.


Ici, nous retrouvons une dénommée Vivienne Orland. Vivienne Orland connait bien la Jeune Académie :  elle fut premier prix de poésie de la Jeune Académie pour son ouvrage Ecce Homo et vit son recueil de poème Le Cygne Sauvage publié aux éditions de la Jeune Académie.

Mais, elle fut également l'auteur d'ouvrages tels que Sous le triangle (1935), La Franc-Maçonnerie Danger Social (1936) ou Franc-Maçonnerie et Front Populaire (1937) édités aux éditions Baudinière. Ces trois derniers livres furent écrits en collaboration avec Albert Vigneau, collaborateur de Vichy anti-maçon de Bernard Faÿ. Il finira condamné pour faits de collaboration à 20 ans de prison où, d'ailleurs, il décédera.

Dans le livre auquel le lien mène, nous pouvons lire, page 24 : « Si le Front Populaire devient effectivement maître chez nous, (...) ce sera peut-être la Révolution sanglante où l'on verra les vrais patriotes brimés, menacés, massacrés. Ce sera la violation de la propriété, de la liberté individuelle. Certaines catégories d'étrangers, semeurs de trouble, meneurs redoutables, juifs de mauvais aloi, métèques protégés des loges, sont prêts, hélas ! à cette triste besogne ».

Par ailleurs, les éditos de L'Œuvre latine de Raoul Follereau sont cités à au moins trois reprises : pages 43, 69 et 70.


Ici, nous trouvons un extrait du livre 100 fiches d'histoire du XXème siècle d'un collectif d'auteurs (Caroline Bégaud, Tramor Quemeneur, Éric Lafon, Laure Pitti) aux éditions Bréal. Qu'écrivent-ils ? Page 134, ils écrivent, concernant la mobilisation des nationalistes français en faveur des franquistes pendant la guerre civile espagnole « Des trafics d'armes et de subsides sont organisés, notamment dans l'Algérie française (...) : Raoul Follereau fonde la Ligue d'Union latine qui, sous des prétextes spécieux invoquant la reconstruction des églises espagnoles, organise des meetings politiques radicaux tout en récoltant de l'argent envoyé aux nationalistes espagnols ». 


Ici, nous trouvons la référence à un livre de Marianne AURIOL intitulé Histoire de France pour les enfants, édité en 1936 par la Ligue d'Union Latine. Ce livre, que nous n'avons pas eu entre les mains, a néanmoins été préfacé par le Maréchal Franchet d'Espèrey qui fut un discret soutien de l'organisation terroriste d'extrême droite La Cagoule lors de sa création, en 1934.


Ici, nous lisons que Maurice Bousquet (existe-t-il un lien de famille avec le sinistre René Bousquet, secrétaire général de la police du Régime de Vichy ?) fréquentait sous le pseudo René Hener les cercles tels la Ligue d'Union latine de Raoul Follereau. Nous restons bien dans les milieux de la latinité et de l'extrême droite française. Il est effectivement écrit : « S’opposant vigoureusement aux courants littéraires avant-gardistes qui bouleversent la forme et la structure de l’écrit, tel le surréalisme, (René Hener et Jean Romann) se veulent les défenseurs et promoteurs du vers français traditionnel. Leurs racines sont « l’Antiquité, la Grèce et Rome », leur inspiration : les auteurs classiques français. Leur maître tant en littérature qu’en politique est Charles Maurras : plusieurs des rédacteurs de la revue se revendiquent comme ses disciples. Cette fidélité à l’Action française ne se démentira pas. Après guerre, les éditoriaux à caractère politique et polémique disparaîtront au profit d’une orientation plus strictement littéraire, mais les poètes amis de la revue demeureront pour beaucoup des collaborateurs de l’hebdomadaire Aspects de la France.»



Synthèse et conclusion


Au fil de ces extraits, nous avons pu avoir un aperçu de la doctrine et de l'idéologie de Raoul Follereau.

 

Certes, la Ligue d'Union latine est une organisation qui vise à promouvoir la culture, l'art et la littérature.

 

Mais primo, la Ligue d'Union latine ne serait être limitée à cela et secundo, il ne s'agit pas de n'importe quel Art, Culture ou Littérature.

 

Premièrement, la Ligue d'Union latine n'a pas que vocation à éditer des auteurs. La Fondation Raoul Follereau mentionne, dans ses publications disponibles sur leur site internet, qu'"Avec sa ligue d'Union latine, Raoul Follereau se lance dans la bataille des idées". Cette formulation pour le moins pudique serait amusante si elle n'occultait pas le fait que "ses idées" sont celles véhiculées par l'extrême droite la plus virulente de l'entre-deux-guerres en France.

 

Il faut le dire clairement, Raoul Follereau développe une doctrine qui, à bien des égards, est d'inspiration fasciste :

- rejet de l'égalité républicaine et du parlementarisme,

- promotion d'une élite destinée à gouverner et diriger le peuple,

- promotion d'une société basée sur la Morale, l'Ordre et la Discipline,

- promotion des valeurs Dieu, Travail, Famille, Patrie,

- restriction de la communauté nationale autour des valeurs d'une civilisation exclusivement blanche, latine et ultracatholique,

- rejet des modérés, des libéraux, des idéologies non catholiques (protestants, juifs, ...) ou athées (communistes, francs-maçons),

- vision ultraconservatrice voire même réactionnaire des courants modernes et avant-gardistes de l'Art,

- conception utilitariste de l'Art afin d'en faire un outil de propagande idéologique et d'éducation du peuple,

- etc.

 

Pour cela, il s'inspire directement de Charles Maurras qui fut LE théoricien majeur du nationalisme intégral avec tout ce que cela suppose d'idéologie antisémite, xénophobe et ethnocentrique. Et il n'hésite pas à côtoyer et à s'afficher en public avec des théoriciens célèbres de l'antisémitisme et de l'antibolchevisme tels Henry Coston, Henri-Robert Petit, Jacques Ditte, Louis Darquier de Pellepoix, le Comte Armand de Chastenet de Puységur, etc. (voir article ici).

 

Deuxièmement, si son activité littéraire et culturelle est bien réelle, elle s'inscrit dans une démarche de pure propagande idéologique. La promotion de jeunes auteurs semble prioritairement liée à la conformité de leurs convictions politiques, spirituelles ou idéologiques avec celles qui habitent Raoul Follereau.

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 

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29 mai 2010 6 29 /05 /mai /2010 20:50

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 

 

http://dutron.files.wordpress.com/2009/02/maurras.jpg?w=319&h=422http://www.solidprinciples.com/blog/wp-content/uploads/2009/09/mussolini-image004.jpgLors de nos articles précédents, nous avons abordé la filiation quasi-spirituelle de Raoul Follereau avec les idées du nationalisme intégral de Charles Maurras (photo de gauche) (article ici), l’adhésion de Raoul Follereau, dès 1926, au régime fasciste italien de Bénito Mussolini (article ici), sa participation à des conférences antisémites et xénophobes comme celles du Centre de Documentation et de Propagande d'Henri-Robert Petit (article ici) ainsi que son admiration, y compris après la découverte des horreurs de la seconde guerre, pour le Maréchal Pétain (article ici ou aussi ici).

 

Dans ce nouvel article nous vous proposons d’aborder un nouvel aspect de la vie cachée de Raoul Follereau : la Ligue d’Union Latine.

 

Courant 1927, en effet, Raoul Follereau fonde une association appelée Ligue d’Union latine. L’organe de presse de ce mouvement est un journal mensuel intitulé l’Œuvre Latine.

 

http://a33.idata.over-blog.com/299x172/1/18/07/51/logonouveau.jpgOfficiellement, selon les documents disponibles sur le site internet de la Fondation Raoul Follereau (disponible ici), cet organisme n'avait qu'une vocation littéraire et humaniste : « il fonde la Ligue d’Union latine, et, en moins de 5 ans, édite plus de 100 auteurs et permet à plus de 300 auteurs et interprètes de théâtre de se faire connaître. Il organise aussi des concerts, des expositions… Il veut aider des amateurs et de jeunes « professionnels », français et étrangers, à s’exprimer, à partager leur passion et à réaliser leurs rêves. Son objectif : contribuer ainsi à renforcer la paix dans le monde. » (page 1).

 

http://enroutepourmadagascar.com/IMG/photos/raoulfollerau.jpgLe même document reprend : « En 1927, il fonde la Ligue d’Union latine avec son organe, un journal qui s’appelle L’Œuvre latine. (…) : on trouve dans ce journal des publications de poèmes ; il y aura aussi, à côté de ce journal, des publications de recueils de poèmes. En 5 ans, il édite 150 volumes de 100 poètes différents. » (ibid page 5).

 

Toujours selon ce document, cet outil de communication permet à Raoul Follereau de formaliser une doctrine (ibid page 5).

 

Cette doctrine sera rappelée aussi bien dans ses conférences Faut-il arracher les cordes de la Lyre ?, Le sourire de la France ou dans son livre La trahison de l’intelligence (tous les trois disponibles dans Œuvres complètes de Raoul Follereau aux éditions Fondation Raoul Follereau, en 5 volumes, disponibles ici).

 

Une lecture attentive de ces documents nous amène pourtant à un constat nettement moins politiquement correct que de bonnes intentions générales comme l'aide à la création littéraire ou la paix dans le monde.

 

Cependant, avant d’aborder le fond de la doctrine élaborée par Raoul Follereau (que nous examinerons ici), examinons tout d’abord l’intitulé de la Ligue d’Union Latine.

 


Une homonymie bien gênante.

 

Tout d’abord, si nous nous plaçons en 1927, nous découvrons qu’il existe déjà une organisation appelée Ligue latine, puis Union latine. L’objectif de cette organisation qui œuvre plutôt dans les départements français d’Algérie, notamment celui d'Oran, est de liguer les colons européens contre les juifs d'Algérie. En effet, la question juive est un sujet de vive préoccupation en Algérie. Le décret Crémieux de 1870 qui accorda la nationalité française aux juifs algériens suscita des vagues d’antisémitisme chez les colons (voir ici, ici ou encore, ).


Le Docteur Molle, Jacques Molle, est de ceux-là. Il fonde les Unions latines au tout début du XXème siècle avec un programme ouvertement antijuif, notamment une politique de boycott des commerces juifs. Il devient maire d’Oran en 1925 et fonde son journal Le Petit Oranais qui arborera la croix gammée en première page. (source ici). A partir de ce moment-là, ses Unions latines connurent un essor considérable et dominèrent la vie politique de la région d’Oran (source ici). En 1930, le Docteur Molle fonde un parti politique, le Parti National Populaire et divers candidats se présenteront aux élections d'avril 1936 avec l’étiquette « candidat antijuif d'Union Latine » : Henry Coston, Henri-Robert Petit, un dénommé Navarro (voir ici).

 

http://webplaza.pt.lu/ffl/images/RF028.jpgLe lien entre les deux organisations homonymes, celle de Raoul Follereau et celle du docteur Jacques Molle, pose donc question.

 

Étienne Thévenin n'aborde absolument pas le sujet dans sa biographie. (Raoul Follereau, Hier et aujourd'hui, Fayard, 1992).

 

Pourtant, nous relevons une série d’éléments troublants :

- une convergence de date

- une convergence de thème

- une convergence de lieu

- une convergence de noms

 

 

a. Convergence de date

 

Tout d’abord, la coïncidence de date saute aux yeux. Fondée au début du XXème siècle, la Ligue latine du docteur Molle prend son essor en 1925, après l'accession de ce dernier à la mairie d’Oran. Son influence est signalée significative dès 1926. Quelques mois après l'accesson de Jacques Molle et de son Union Latine à la mairie d'Oran, Raoul Follereau, fonde sa propre Ligue d'Union latine.

 


b. Convergence de thème

 

Nous relevons dans un second temps une convergence thématique entre ces deux structures. En effet, pendant les années trente, le thème de la défense de la culture gréco-latine est une rhétorique classique de l’idéologie de l’extrême-droite française.

 

http://www.archive-host2.com/membres/images/1557492763/couvertue_faux_antisemite_protocole_des_sages_de_sion.jpgAlors que le pangermanisme, et plus spécifiquement le nazisme, développe une conception raciale du peuple aryen (Volkstum), c'est plutôt l'idée d'une identité culturelle et d'une civilisation latine qui constitue un des points communs des différentes extrêmes-droites françaises de l'entre-deux guerres.

 

Dans cette idéologie, tout ce qui est étranger au socle culturel gréco-latin est, de fait, étranger à la nature même de la France. Cet ultrapatriotisme, fortement imprégné du nationalisme intégral de Charles Maurras, (voir ici, le maurassisme) n’est donc pas à proprement parler raciste, au sens biologique du terme.  En outre, ce culte de la greco-latinité s'ssocie souvent à un fort sentiment de supériotrité de ses promoteurs. Nous sommes plutôt tentés de parler d'un racisme culturel ou civilisationnel (ethnocentrisme qui servivra de fondement, d'ailleurs, à l'idéologie coloniale).


  http://photomaniak.com/upload/out.php/i173047_11NOV94.JPG

Les partisans de l’extrême droite des années trente luttent donc contre les internationalismes et les cosmopolitismes de toutes espèces comme, par exemple, « les agents de l’Anti-France » dénoncés par Charles Maurras, à savoir les juifs, les communistes, les étrangers, les francs-maçons, et d’une certaine façon, les protestants (voir ici).

 

La notion de défense de la civilisation greco-latine doit donc être comprise à la fois dans sa composante positive (promouvoir une culture est, par définition, une démarche positive) mais également dans sa dimension négative : la France, selon les maurrassiens, ne peut être que monoculturelle (blanche, catholique et royale). Elle doit donc être "débarrassée" des éléments qui la "dénaturent".

 

La consécration de cette idéologie ethnocentriste se trouve dans le Régime de Vichy.

 

Lors d’un de ses discours radiodiffusés au cours duquel fut exposée aux Français la nécessité d’une reconstruction morale, le Maréchal Pétain se réfèrera explicitement à l’héritage de la culture grecque et latine de la France (le texte du discours du 11 octobre 1940 sur "l'ordre nouveau" est ici). De cette Révolution Nationale découlera, dès juillet 1940, l'antisémitisme d'Etat via les statuts des Juifs, la lutte contre la franc-maçonnerie et les communistes, etc.

http://coranix.org/killers/petain.jpg

 

Raoul Follereau embrasse dès juin 1940 le pétainisme et les thèmes de la Révolution Nationale issue de la  divine surprise du 10 juillet 1940, selon le mot de Charles Maurras. D'ailleurs, la citation selon laquelle le régime de Vichy soutient "les héritages de nos cultures grecques et latines" figure en exergue sur chaque numéro du mensuel L'Œuvre Latine de Raoul Follereau (Thévenin p.153). 

 

Durant la seconde guerre, Raoul Follereau multiplie les conférences de soutien en faveur du Régime de Vichy (Thévenin pages 151 et suivantes, 173, 183) et sa fidélité au Maréchal restera sans faille, même après la découverte des modalités et des conséquences de la collaboration (voir ici).

 

André Récipon, le fils spirituel de Raoul Follereau et président de ce qui deviendra la Fondation Raoul Follereau écrira à ce sujet : "Toute sa vie, [Raoul Follereau] restera fidèle au Maréchal et considérera sa condamnation comme une tache à l’honneur de la France" (source ici).

 


c. Convergence de lieu

 

http://www.heiligenlexikon.de/Fotos/Charles_de_Foucauld2.jpgLes territoires d'Afrique du Nord, en général, et d'Algérie en particulier sont familiers pour Raoul Follereau. Il dispose là-bas de solides réseaux et connaît bien le terrain. Il y est connu et reconnu.

 

Tout d‘abord, Raoul Follereau s’intéresse particulièrement à l’Afrique du Nord, notamment en raison de son engouement pour la personne de Charles de Foucauld (photo ci-contre à droite) qu’il aurait découvert à partir de 1936. Raoul Follereau voit en Charles de Foucauld un modèle de la France catholique, missionnaire et colonisatrice. Il consacrera beaucoup d'énergie pour faire passer le "petit frère universel" pour une icône de ses idées ultranationalistes. Après la guerre, en 1946, il sera demandé à Raoul Follereau de cesser d'utiliser le nom et la mémoire de Charles de Foucauld à des fins politiques (Thévenin page 223). Voir notre article détaillé sur ce sujet ici.

 

Également, Étienne Thévenin signale que Raoul Follereau ira en Algérie au début de l’année 1942 (ibid p.163). Il y reste plus de deux mois et y tient plus de soixante-dix conférences qui auraient rassemblé plus de 100.000 personnes, soit 1.500 auditeurs de moyenne.

 

On peut donc affirmer que Raoul Follereau est connu là-bas, et apprécié par un nombre très significatif d'individus. Thévenin mentionne notamment le fait que Paul Bellat, maire de Sidi-bel-Abbès, et « une grande partie de son conseil municipal » sont des « membres actifs » de la Ligue d’Union Latine. Raoul Follereau sera d'ailleurs fait citoyen d'honneur de la ville de Sidi-bel-Abbès. Or, Sidi-bel-Abbès se trouve dans le département qu’Oran, le fief du feu Docteur Molle et était réputée être un fief de l'extrême-droite (source ici).

 

Il résulte de ces deux éléments de réflexion que Raoul Follereau connaît bien et est bien connu en Afrique du Nord durant les années trente puis quarante.

 


d. Convergence de noms

 

Nous relevons que le Docteur Molle a fondé le Parti National Populaire en 1930 avec un certain Henry Coston. Cet individu se présentera aux élections d'avril 1936 à Alger sous l’étiquette "candidat antijuif d'Union latine" et se considérera comme le continuateur des idées antisémites de Jacques Molle, décédé en 1932. Coston est d'ailleurs reconnu par Ralf Schor comme un théoricien de l'antisémitisme (voir ici).

 

Soulignons d'ailleurs que, dans ce cadre de ces élections de 1936, Henry Coston baptisera la version algérienne de son journal antisémite La Libre Parole "hebdomadaire anti-juif d'action latine". Encore une référence à la latinité ...

 

Or, les lecteurs de notre blog qui ont lu nos articles antérieurs n’ignorent pas qu’Henry Coston a repris le journal La Libre Parole pour en faire l'organe de presse du Parti National Populaire fondé par, entre autres, Jacques Molle et lui-même (voir ici diverses couvertures de La Libre Parole entre 1932 et 1936).


En outre, nous savons également que Coston travailla en étroite collaboration avec Henri-Robert Petit dans la cadre du fameux Centre de Documentation et de Propagande dont nous avons déjà parlé ci-dessus. Henri-Robert Petit sera, lui aussi, candidat anti-juif d'Union latine aux élections législatives de 1936. 

 

Comme nous l'avons démontré ici, c'est aux côtés de ces gens-là (ainsi que de Louis Darquier de Pellepoix) que Raoul Follereau participera, en qualité de conférencier, au début de l’année 1936, à une réunion au cours de laquelle des argumentaires violemment xénophobes, antisémites et antimaçons seront développés.

 

En conclusion, Henry Coston, Henri-Robert Petit et Raoul Follereau se connaissent, se rencontrent et, apparemment, s'apprécient suffisemment pour travailler ensemble sous des étiquettes communes dans la perspective d'élections qui allaient suivre quelques jours ou semaines plus tard.

 


Conclusion


http://www.ffl.lu/mmp/online/website/menu_vert/raoul_follereau/56/image_1388/couverture_livret_follereau.jpgMême dénomination, convergences de dates, de thème, de lieux, de noms … nous ne pouvons être qu’interpelés par ces éléments. factuels et objectifs.

 

Il nous semble guère possible d'imaginer que la Ligue d'Union latine de Raoul Follereau n'ai rien eu à voir avec l'Union latine fondée par Jacques Molle ou avec les candidats antijuifs qui se revendiquaient "d'Union Latine" aux élections de 1936.

 

Ces deux mouvements sont-ils deux déclinaisons d'un mouvement unique ?

L'un a-t-il été créé par l'autre ou avec le soutien de l'autre ?

Sont-ils concurrents mais néanmoins amis ?


Autant de questions auxquelles la réponse d'un historien objectif et sérieux serait la bienvenue. Le moins que l’on puisse affirmer, c’est que le sujet mérite un approfondissement. Pourtant, Etienne Thévenin semble ignorer ce sujet et n’en souffle mot dans son livre. C’est bien regrettable.

 

Dans la seconde partie de cette étude à venir (ici), nous aborderons la doctrine proférée par Raoul Follereau dans ses trois textes fondateurs :

- Faut-il arracher les cordes à la lyre ?

- Le Sourire de la France

- La trahison de l'intelligence

 

 

Appel à témoignage ou à document

 

Si vous disposez de traces écrites ou sonores concernant Raoul Follereau, notamment pendant la période de l'entre-deux guerres, n'hésitez pas à nous en faire part. Afin que toute la lumière soit apportée sur ces zones d'ombre.

 

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 

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27 avril 2010 2 27 /04 /avril /2010 13:42

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 



Inusable, Jean-Marie Le Pen ne s'arrêtera donc jamais. Sa dernière idée en date : affirmer que les Juifs de France furent les bénéficiaires de l'action du gouvernement du Maréchal Pétain.

 

 

 

 

Pas facile à entendre pour les 97% des Juifs déportés de France entre 1940 et 1944 qui ne revinrent jamais dans leurs foyers.

Statistiquement, les Juifs de France auraient été moins décimés que leurs coreligionnaires vivant dans d'autres pays d'Europe occidentale tels que la Belgique ou la Hollande. Alors Jean-Marie Le Pen s'empare de ces chiffres et en attribue le mérite à la politique de collaboration mise en œuvre par le Maréchal Pétain et son sbire germanophile Pierre Laval.

 

http://jean_paul.gourevitch.perso.sfr.fr/propagande/Petain.jpgEn faisant cela, Jean-Marie Le Pen ne fait qu'énoncer la stratégie de défense déployée par les pétainistes depuis fort longtemps : Pétain aurait fait le dos rond face à l'occupant nazi en attendant que les alliés viennent au secours de l'Europe envahie.

Cette théorie a été rappelée il n'y a pas si longtemps par  André Récipon, le fils spirituel de Raoul Follereau, fondateur et premier président de la Fondation Raoul Follereau.

http://www.librairietequi.com/I-Miniature-1100-combat-pour-la-charite.aspxAndré Récipon (père de Michel Récipon, actuel président de la Fondation Raoul Follereau) a en effet publié en 2001 une lettre ouverte dans la revue Le Maréchal n°202 (lien ici).

Tout d'abord, précisons que la revue Le Maréchal est l'organe de presse de l'Association pour Défendre la Mémoire du Maréchal Pétain dont l'objet social est la révision du procès de 1945 du Maréchal (voir ici). Ambiance.

Dans cette lettre ouverte aux tonalités très fortement marquées par son antibolchevisme et son antigaullisme, André Récipon parle en son nom, mais cite également la mémoire et la pensée de Raoul Follereau. Il y donne une version bien étrange de la France sous l'Occupation. Avec 55 ans de décalage, c'est un retour aux heures les plus sombres de notre Histoire que André Récipon nous propose. Extraits.

 

 

Sur la responsabilité de la défaite de juin 1940 :

 

http://www.admp.org/revues/lm202.jpg"La politique du Front Populaire et la trahison des communistes avaient entraîné une telle défaite de nos armées (...)" (en mai/juin 1940)

André Récipon reprend ici une thèse chère au régime de Vichy  selon laquelle les responsables de la défaite de 1940 étaient les hommes de la IIIème République parlementaire, notamment et surtout ceux du Front Populaire. Ces responsables, dont certains (comme Léon Blum) avaient le mauvais goût d'être de gauche et/ou juifs et/ou franc-maçons (en 1940, cela ne se faisait pas ...), furent donc traduits en justice lors du fameux procès de Riom, parodie de justice que Mussolini lui-même qualifiera de "farce typique de la démocratie".


Mais leur défense fut si vigoureuse que les accusateurs se retrouvèrent en position d'accusés. Finalement, le Maréchal Pétain décidera en 1941 de prononcer lui-même les sanctions, au mépris de la souveraineté de la Cour Suprême de Justice pourtant spécialement créée à cette fin et de toute notion de séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le judiciaire.

 


Sur la préférence du nazisme face au communisme


http://jean_paul.gourevitch.perso.sfr.fr/propagande/Confiance.jpg

"J’ai toujours considéré le nazisme d’Hitler et le communisme de Staline, comme les pires des régimes que les hommes aient eu à subir. C’est pourquoi le 21 juin 1941, j’ai repris espoir : les deux régimes allaient se détruire. Hélas l’aveuglement démocrate de Roosevelt changea la donne. Songez que dans la seule année 1943, il fournit à Staline 240.000 véhicules de toute nature : chars, auto-canons, half-tracks, camions, voitures, locomotives, wagons, etc… !"

André Récipon reproche donc à Roosevelt l'aide matérielle et logistique apportée aux soviétiques. Poussé par son anticommunisme viscéral, André Récipon rejoint ainsi les propos de Pierre Laval qui disait, juste après son retour aux affaires, le 22 juin 1942 " Je souhaite la victoire de l’Allemagne, parce que sans elle, le bolchevisme, demain, s’installerait partout".
 

 

"Notre présence aurait sauvé du déshonneur les Français qui n’avaient pas commis d’autre crime que celui d’être anti-communiste."

André Récipon fait ici allusion aux français qui optèrent pour la collaboration avec l'Allemagne nazie car il leur semblait plus important d'abattre le bolchevisme.



Sur De Gaulle et les procès de la Collaboration


http://www.necrosant.net/zbxe/files/attach/images/3392/956/010/Pierre%20Laval.gifDe Gaulle "a fait condamner ceux qui pendant quatre ans avaient dû subir les diktats de l’occupant, ceux qui avaient fait de leur corps et de leur personnalité un rempart pour protéger les Français et les deux millions de prisonniers. Même Laval n’a jamais trahi. Il a négocié, lutté, ergoté comme l’avocat qu’il était et comme le paysan madré qu’il restait. Il ne cédait que pour éviter un plus grand mal et il est mort assassiné par des balles françaises. Son procès est une monstruosité judiciaire qui entache l’honneur de la France."

Défense ardente du Maréchal Pétain ("je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur") et, plus surprenant encore, de Pierre Laval, "mort assassiné" en 1945.

 

Rappelons juste que Pierre Laval, c'est la collaboration à outrance avec l'Allemagne nazie, la déportation des Juifs, y compris les enfants pourtant non réclamés, initialement, par les Allemands, la création de la Relève, puis du STO, la création de la Milice, la lutte contre la Résistance et les maquis, l'envoi de Français sur le front russe sous l'uniforme Waffen-SS, etc.

 

 

Où André Récipon dédicace cette lettre ouverte à son père spirituel, Raoul Follereau

"Mais pour moi que Raoul Follereau considérait comme son fils et qui suis son héritier spirituel, il me semble que je lui donne par cette lettre une nouvelle preuve de mon attachement. (...) Toute sa vie il restera fidèle au Maréchal et considérera sa condamnation comme une tache à l’honneur de la France."

 

 

Alors, Jean-Marie Le Pen, André Récipon, Raoul Follereau : même combat, mêmes valeurs ? Il n'est aucun doute possible. Raoul Follereau consacra toute l'entre deux guerre à la promotion des régimes fascisoïdes d'Europe et d'Amérique du Sud sous prétexte de la défense de la latinité et de la civilisation chrétienne (ici). pour Raoul Follereau, comme pour André Récipon, le régime de Vichy est le sursaut moral (la "divine surprise" selon Charles Maurras) dont la France manquait cruellement depuis le renversement de la monarchie en 1789.

 

Rien d'étonnant, donc, à ce que André Récipon cherche à défendre le Maréchal Pétain.

 

Plus étonnant, cependant, que son raisonnement aille jusqu'à défendre Pierre Laval qui avait pourtant réussi à susciter à son égard une haine aussi virulente qu'unanime, du Général Weygand à l'Amiral Darlan, du Maréchal Pétain au Général De Gaulle.

 

De l'avis de tous, il n'est pas d'honneur à se traîner dans la fange pour tenter de complaire à son bourreau. Même le Général Franco refusera l'asile à cet hôte encombrant. Laval qui se prétendait être un renard de la géopolitique est entré dans l'Histoire pour ce qu'il fut : un parvenu opportuniste et ambitieux dénué de tout sens de l'honneur et de la dignité.

 

Le fait que 46 ans plus tard, André Récipon se proclame de ses soutiens ne doit pas laisser indifférent. C'est le symptôme de quelque chose de beaucoup plus profond et de beaucoup plus préoccupant. C'est le signe d'une certaine perception de l'humanité - de façon générale - et de la France en particulier. Perception qu''André Récipon reconnait partager avec Raoul Follereau. Perception qu'il entend transmettre à son fils Michel Récipon et à ses petits-enfants via la Fondation Raoul Follereau. Cela mérite que nous enquêtions à ce sujet : c'est l'objet même de ce blog.

 

Nous recommandons un autre article de notre blog (ici) dédié à la pensée d'André Récipon (sur le révisionnisme, l'antisémitisme, l'implication de la famille Récipon dans la Fondation Raoul Follereau, sa proximité avec le Front National, etc.).

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 

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23 avril 2010 5 23 /04 /avril /2010 15:32

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 


Nous poursuivons nos études relatives à la vie de Raoul Follereau.


Dans un premier article (ici), nous avons exposé de quelle façon Raoul Follereau soutint et admira le régime fasciste italien de Bénito Mussolini.

 

Dans un second article (ici), nous avons relaté la participation active de Raoul Follereau à une "réunion de propagande" organisée le 10 février 1936 par le Centre de propagande et de documentation, organe antisémite, anti-bolchevique et anti-maçon, éditeur du journal de la même veine intitulé "La Libre Parole & Le Porc- Épic ".

 

Nous allons souligner à présent la proximité d'idées entre Raoul Follereau et le mouvement Action française de Charles Maurras.

 



Charles Maurras & L'Action française


http://jmguieu.free.fr/Enseignements/L3_France_Allemagne_Europe/Maurras.jpgInitialement poète et écrivain, Charles Maurras se lance dans la politique à la fin du XIXème siècle. Il devient alors un acteur majeur et incontournable de la droite nationaliste puis monarchiste.


Théoricien et idéologue, père du "nationalisme intégral", Charles Maurras influença la fraction la plus conservatrice de la bourgeoisie française catholique de l’entre-deux-guerres.


Le "complot contre la France" est au centre du corpus idéologique maurrassien. Ce complot est l'œuvre de l'Anti-France que constituent les "quatre États confédérés : Juifs, Protestants, Maçons, Métèques".

 

Ces quatre forces anti-françaises formaient, selon lui, le "gouvernement de l'Étranger, à l'intérieur de la France". Concernant plus particulièrement les Juifs, Charles Maurras écrivait, dès 1903, puis à nouveau en 1913, que les Juifs français devaient être dénaturalisés, sans exception, afin de mettre fin à leur influence dans l'État. C'est le concept d’"antisémitisme d’État".


Dès 1908, l'Action française se dote d'un bras armé avec les Camelots du Roi, sorte de milice privée pratiquant coups de mains, coups de cannes et autres manifestations ultra violentes contre les "ennemis de la France", mais également contre d'autres groupuscules d'extrême-droite.

 

D'un point de vue institutionnel, Charles Maurras fut initialement nationaliste (sous l'influence d'Édouard Drumont, polémiste et fondateur du journal antisémite La Libre Parole dont nous avons déjà parlé ici) puis devint monarchiste. Son anti-parlementarisme l'amènera également à soutenir des régimes autoritaires et /ou fascistes tels ceux de Mussolini, Salazar, Franco ou Pétain. En revanche, profondément germanophobe, il ne soutiendra jamais Hitler et le nazisme.


D'un point de vue spirituel, Maurras se définit comme agnostique (une supposée conversion de dernière minute serait discutée par les spécialistes) : il ne soutient le catholicisme d'État que comme un moyen d'unifier la Nation autour d'un idéal commun. Pour Charles Maurras, la France s'inscrit dans sa tradition séculaire où monarchie rime avec religion d'État et il se trouve que cette religion est le catholicisme. Par conséquent, pour Charles Maurras, le catholicisme est consubstantiel à l'identité nationale française. La cathophilie de Charles Maurras est donc le fruit d'un constat sociologico-historique et non un acte de Foi.

 

http://chapenfants.chez-alice.fr/imagessite/le%20Pape%20Pie%20XI.jpgDepuis plusieurs années (1914), déjà, le Vatican désapprouve cette doctrine où rationalisme se conjugue avec primauté du politique sur le spirituel. Mais ce n'est qu'en 1926 que le Vatican condamne officiellement l'Action française et met à l'index ses livres et journaux. En mars 1927, les adhérents à l'Action française sont interdits de sacrements. Suite à cette excommunication, Pie XI sera rebaptisé Levy XI par les fidèles de l'Action française (ici).

 

De ce fait, soit par conviction, soit par obéissance au Pape, de nombreux catholiques (Jacques Maritain, par exemple ou, un peu plus tard, Georges Bernanos) prendront leurs distances avec l'Action française qui déclinera progressivement.


Au cours des années qui suivent, le Vatican rejette formellement un certain nombre d'idées défendues par l'Action française : en effet, après la condamnation de l'Action française en 1926, Pie XI condamne le fascisme italien (1931) et plus particulièrement l'antisémitisme ("L'antisémitisme est inacceptable. Spirituellement, nous sommes tous des sémites." Pie XI, 6 septembre 1938), comme il condamne d'ailleurs le nazisme (1937) et le communisme (1938).

 

Cet excommunication s'accompagne, onze ans plus tard, en 1937, d'un désaveu officiel du prétendant au trône, le Comte de Paris. Ce qui fera dire à Lucien Rebattet dans Les Décombres, de façon aussi perfide que pertinente : "Maurras, catholique sans foi, sans Dieu et sans pape, terroriste sans tueurs, royaliste renié par son prétendant, n'avait été, en fin de compte, que l'illusionniste brillant de l'aboulie" (ici).

 

Les partisans de l'Actions française voudront répliquer que l'excommunication de Maurras a été annulée en 1939 par Pie XII, qui vient de succéder à Pie XI, ce qui rendrait notre exposé nul et non avenu. Mais c'est bien entendu erroné. L'excommunication dont fait l'objet Maurras en 1926 n'est pas annulée par Pie XII, elle est levée par Pie XII, ce qui est totalement différent. Entre temps, en effet, Maurras a fait acte de repentance et s'est engagé formellement à ne plus proférer ses erreurs passées. La levée de l'excommunication ne réhabilite en rien Charles Maurras (ses livres passés et les numéros antérieurs de l'Action française restent à l'Index et donc hors de la communion de l'Église) mais elle est la conséquence logique du repentir supposé sincère des brebis égarées.

 

En France, après juin 1940, l'Action française se déchire en trois tendances :

- une tendance majoritaire qui suit Charles Maurras dans un soutien au Maréchal Pétain, anti-allemand, mais également anti-gaulliste ;

- une tendance dont l'antibolchevisme prime sur tout le reste et qui verse alors dans la germanophilie et/ou la collaboration active avec l'occupant nazi ;

- une tendance résistante à Londres.

 

Ici, un article complémentaire sur l'Action française.

 


Charles Maurras, amateur de belles lettres ...

 

À Abraham Schrameck, Ministre de l'Intérieur en 1925 : "Ce serait sans haine et sans crainte que je donnerais l'ordre de répandre votre sang de chien si vous abusiez du pouvoir public pour répandre du sang français répandu sous les balles et les couteaux des bandits de Moscou que vous aimez".

 

À propos de Léon Blum, président du Conseil en 1936 : "C'est en tant que Juif qu'il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum. Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café : je me hâte d'ajouter qu'il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour où sa politique nous aura amené la guerre impie qu'il rêve contre nos compagnons d'armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer".

 

Ouvrons une parenthèse : en ce qui concerne "la guerre impie contre nos compagnons d'armes italiens", il faut quand même souligner l'ironie de l'Histoire suivante : c'est l'Italie qui déclarera finalement la guerre à la France le 10 juin 1940 alors que nos armées étaient décimées par la Wehrmacht et la Luftwaffe, et ceci, dans l'unique objectif d'être présent à la table des vainqueurs, et ainsi, soutirer assez minablement quelques concessions territoriales (Corse, Savoie ou Nice). Cependant, les attaques italiennes dans les Alpes furent tellement pathétiques qu'Hitler s'opposera en personne à ces prétentions territoriales pour le moins déplacées. Fermons la parenthèse.


 

Qu'en est-il de Raoul Follereau ?

 

Dans sa biographie qui nous sert de principale référence pour nos travaux (Raoul Follereau, hier et aujourd'hui, 1992, Fayard), Étienne Thévenin indique que, bien que non adhérent (l'audience de Maurras dépassait très largement le périmètre finalement assez limité des abonnés à l'Action française),  "Raoul Follereau fait siennes la plupart des indignations nationalistes et antirépublicaines de l'Action Française. Il est profondément imprégné de l'œuvre, de la méthode et des concepts de Maurras. Il lit l'Action française dont il apprécie le ton polémique, les analyses politiques, et les pages littéraires et artistiques, lesquelles sont rédigées avec le plus grand soin. (...) Maurras est indéniablement le "Maître à penser" du jeune Raoul Follereau" (ibid p.30) voire même un "père spirituel" (ibid p.223).

 

http://www.zeblog.com/blog/uploads/r/radvox/marc%20sangnier(1).jpgCet attachement au mouvement de Charles Maurras ne sera pas affecté par la condamnation, par Pie XI, de l'Action Française, fin 1926. Bravant les sanctions canoniques, Raoul Follereau continue à suivre l'Action française et à en propager les idées. Il considère, en effet, que l'infaillibilité pontificale n'est pas en cause, et que cette interdiction est le fruit d'un "complot" des démocrates chrétiens et des membres du Sillon de Marc Sangnier (ibid p.52).


Rappelons que Marc Sangnier (photo à droite) est une figure du catholicisme rallié à la République et à la démocratie républicaine. En outre, il était du camp des philosémites et combattait ardemment l'antisémitisme :  "la question de la persécution juive dépasse les affaires intérieures d’un pays ; c’est une affaire qui regarde la conscience humaine tout entière" (lien ici) ; il est donc à l'opposé des thèses de l'Action française et incarne la "bête noire de l'Action française" (ibid p.238).


Relevons également qu'il est fait mention du concept du complot, ici à propos de celui dont Pie XI aurait été victime, du fait des démocrates chrétiens ralliés à la République. Raoul Follereau utilisera également la théorie du complot, en le qualifiant de "maçonnique", en 1935 à propos des sanctions prises par la Société des Nations à l'encontre de Mussolini dans l'affaire éthiopienne (voir notre article).

 

Il ressort donc de ces éléments que Raoul Follereau s'inscrit délibérément et volontairement dans la ligne de pensée de Charles Maurras qui est, rappelons-le, et entre autres qualificatifs possibles, antisémite, xénophobe, antiprotestant, anti-maçonnique et anti-parlementariste. Précisons, accessoirement, que son catholicisme n'est qu'utilitariste et que Pie XI prendra formellement ses distances avec lui.


Raoul Follereau "s'inscrit dans la mouvance de l'Action française. Il fait siens la plupart de ses concepts" (ibid p.52).

 

Cet attachement à la personne de Charles Maurras et aux idées de l'Action française ne sera jamais démenti, même après les atrocités de la seconde guerre. Et afin de sceller pour l'éternité leur communion de pensée, Raoul Follereau fera graver sur sa propre tombe une citation. Une seule. Une citation signée Charles Maurras (ibid p.223).



"Peut-on considérer Raoul Follereau comme un fasciste authentique ?"


C'est Étienne Thévenin qui se pose à lui-même la question (ibid p.128).  Il y donne une réponse trop peu étayée pour être réellement convaincante.


De notre point de vue, l'adhésion de Raoul Follereau pour les régimes fascistes ou assimilé fascistes, qu'ils soient portugais, espagnol, autrichien, italien, hongrois, roumain, argentinn brésilien ou tout simplement pétainiste (voir ici) ne saurait se limiter à une simple communion de convictions anti-bolcheviques. Pourtant, Étienne Thévenin écrit, page 128, qu'aux yeux de Raoul Follereau "seuls des États autoritaires s'appuyant sur des références chrétiennes et nationales peuvent résister au danger allemand et russe, nazi et communiste".


Il est vrai et indéniable que l'option fasciste a pu parfois être un choix par défaut, sorte de moindre mal face au danger bolchevique. Mais, en ce qui concerne Raoul Follereau, nous pensons qu'il a adhéré aux régimes fascisants pour un ensemble de convictions qui ne sauraient se réduire à un anti-bolchevisme, même primaire.

 

Nous allons traiter deux aspects de la personnalité de Raoul Follereau qui le rapprochent des  conceptions maurrassiennes : l'antisémitisme et l'antiparlementarisme.

 


Raoul Follereau et l'antisémitisme


Sur l'antisémitisme de Raoul Follereau, Étienne Thévenin écrit cette phrase que nous trouvons particulièrement ambiguë : "On peut remarquer qu'à aucun moment, dans ses écrits, Raoul Follereau ne verse dans l'antisémitisme. Ses sentiments chrétiens le préservent de semblables égarements et il sait la réalité que prend alors l'antisémitisme" (ibid p.133).


Tout d'abord, il convient de relever la mention "dans ses écrits" qui nous semble soit maladroite, soit destinée à cacher des choses que le lecteur n'est pas sensé connaître. Cela insinue-t-il que, ailleurs que dans des écrits, Raoul Follereau ait tenu des propos antisémites ? Rappelons ici que le métier principal de Raoul Follereau était conférencier, un métier où l'oral est à l'honneur. Le sujet nous semble donc évacué un peu trop rapidement. Et ce d'autant plus qu'un certain nombre d'éléments factuels et écrits noir sur blanc nous amènent à penser le contraire.


Sans doute Étienne Thévenin ne connaissait-il pas ce numéro 5 de La Libre Parole à propos duquel nous avons déjà écrit un article (ici) et qui démontre la participation délibérée et volontaire de Raoul Follereau en qualité de conférencier à une réunion de propagande principalement antisémite et anti-maçonne, le 10 février 1936.

 

Sans doute Étienne Thévenin ne sait-il pas que parmi les collègues conférenciers qui partagèrent le micro avec Raoul Follereau, présent ce soir-là en qualité de président de la Ligue d'Union latine, se trouvaient Henry Coston et Henri-Robert Petit lesquels seront, quelques semaines plus tard, candidat aux législatives en Algérie sous l'étiquette "candidat anti-juif d'Union latine" (voir notre article sur ce sujet ici).

 

Sans doute Étienne Thévenin ignore-t-il le rôle que Raoul Follereau tint en Algérie française des années trente et les nombreuses conférences qu'il y animait au cours desquelles il tenait ouvertement des propos délibéremment antisémites (voir ici).


Sans doute Étienne Thévenin ne connait-il pas non plus le livre La trahison de l'intelligence de Raoul Follereau dans lequel il qualifie Lénine de "Moïse rouge" (Œuvres Complètes de Raoul Follereau, Les livres, partie A, Éditions Fondation Raoul Follereau, page 152).


http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/c/cf/WhiteArmyPropagandaPosterOfTrotsky.jpg/200px-WhiteArmyPropagandaPosterOfTrotsky.jpgPar ces seuls deux mots, "Moïse rouge", c'est toute une sémantique antisémite que Raoul Follereau reprend à son compte dans laquelle la révolution russe est une première étape vers la domination sioniste universelle. Le lien entre Moïse et la couleur rouge trouve son origine dans un pamphlet antisémite (Der Bolschewismus von Moses bis Lenin ou, en français, Le Bolchevisme de Moïse à Lénine) écrit au début des années 1920 par Dietrich Eckart. Ce sinistre individu est connu pour être complice d'un certain Adolf Hitler lors de sa tentative de putsch de 1923. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en matière d'antisémitisme, Raoul Follereau puise aux meilleures sources.


Sans doute Étienne Thévenin ignore-t-il également que, page 74 de ce même ouvrage (Œuvres complètes de Raoul Follereau, Les Conférences ...), Raoul Follereau affirme que "L'heure est plus grave qu'on ne le pense ; les conflits sont moins de nations que de races". Or, en ce début des années trente, la notion de race est très clairement au centre de toute la dialectique antisémite, afin, justement, de démontrer la supériorité de telle race (aryenne) sur telle autre (juive) (lien sur la hiérarchie des races ici).

 

Comment ne pas faire un lien avec un autre livre de Raoul Follereau intitulé "Les lois antireligieuses de 1904 trahissent la France" dans lequel il parle des Allemands de confession juive comme d'une "race toute puissante" (Œuvres complètes de Raoul Follereau, Les Livres, page 43) ?


Enfin, Étienne Thévenin semble ne pas devoir relever, que, dans cette même conférence, page 70, Raoul Follereau exprime sa xénophobie dans les termes les plus explicites : "J'ai cité Freud, j'eus pu en citer d'autres. Je n'ai rien contre cet étranger, sinon qu'il est étranger, et dangereux comme tel".



Raoul Follereau et l'anti-parlementarisme


Très tôt, Raoul Follereau manifeste une sincère détestation pour la IIIème République française.


http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/44/Comte-de-chambord.jpgIl faut rappeler que ce qui apparait aujourd'hui comme une évidence institutionnelle ne l'étant pas à la chute du IIème empire de Napoléon III. Cet épisode fait partie des anecdotes les plus étonnantes de l'Histoire de France : le prétendant au trône de France, Henri d'Artois (photo à droite), qui aurait pu régner sous le nom d'Henri V de France, a refusé la couronne que lui offrait pourtant l'assemblée de 1871 composée aux deux tiers de députés monarchistes. Officiellement, pour une histoire de drapeau : "Non, je ne laisserai pas arracher de mes mains l'étendard d'Henri IV, de François Ier et de Jeanne d'Arc". Certes, il y avait du panache dans cette décision. Mais elle signa la fin définitive de la monarchie française.


Autre sujet de mécontentement, la IIIème République a pratiqué un anticléricalisme violent, ce qui lui a valu une opposition des plus radicales de la part des populations attachées à la religion catholique.


Mais, cette détestation pour le régime parlementaire va bien au delà d'une simple aversion liée à un contexte.


Raoul Follereau est tout simplement opposé aux principes mêmes du régime démocratiques, et, en tout premier lieu au suffrage universel. Pour lui, la nation doit se confier à une élite : "les hommes ne naissent pas égaux ; ils ne le deviennent ni ne le demeurent (...) La nécessité d'une élite est pour une nation une question capitale, vitale. Le pays doit penser par elle, agir par elle. (...) Le cerveau d'un peuple est nécessaire, mais il ne doit pas tenir le corps tout entier. Une planète de penseurs crèverait de faim." (Les œuvres complètes de Raoul Follereau, Les conférences, Éditions Fondation Raoul Follereau, pages 71, repris dans Les livres, partie A, page 147). Raoul Follereau se revendique clairement comme étant opposé à la Révolution de 1789 et aux principes qu'elle véhicule : Liberté, Égalité, Fraternité ; Raoul Follereau se revendique clairement comme étant contre-révolutionnaire.

 

Nous avons développé les idées politiques de Raoul Follereau dans un article spécifique (ici).


La conséquence, c'est que, adepte d'un pouvoir fort, Raoul Follereau accordera son soutien à la plupart des régimes autoritaires des années trente :

- l'Autriche de Dolfuss ;

- l'Italie de Mussolini (voir notre article antérieur) ;

- l'Espagne de Franco (Thévenin, p.128) ;

- le Portugal de Salazar (Thévenin, p.68) ;

- l'Argentine de Uriburu et de Fresco ;

- ainsi que divers régimes d'Europe centrale (Roumanie, par exemple).


Le 10 juillet 1940, lors de la passation des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, Raoul Follereau est à Vichy (Thévenin, p.150) : avec la Révolution Nationale qui s'annonce, fotement inspiré des thèmes portés par Charles Maurras, Raoul Follereau sait que ses idées, toutes ses idées, seront à l'honneur. Mais c'est déjà un autre article (ici).


http://img.over-blog.com/600x434/1/35/08/38//affiche-r-vachert-revolution-nationale.jpg

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 


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19 avril 2010 1 19 /04 /avril /2010 13:43

 

http://oniropaedia.lm7.fr/images/thumb/Attention.svg/600px-Attention.svg.png

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article dans la version refondue de notre blog sous format PDF

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/

 

 

 

Grâce à Tristan Mendès-France et à son blog, nous disposons d’un document particulièrement intéressant pour notre quête de vérité.

 

Vous trouverez sur ce lien les 35 pages du numéro 5 de La Libre Parole & Le Porc-Epic. La date n’est pas visible. Néanmoins, trois éléments d’information nous aident à la situer précisément :

- le fascicule rend compte d’une réunion de propagande qui s'est déroulée le 10 février 1936 ;

- les articles font abondamment référence à l’agression dont Léon Blum fut victime le 13 février 1936 par les sympathisants de l’Action Française de Charles Maurras lors des obsèques de Jacques Bainville (ici, un lien sur les circonstances de l'affaire) ;

- l'absence d’information concernant le résultat des élections législatives d’avril 1936 laisse à penser que le bouclage du journal a eu lieu avant.

 

Ce document est exceptionnel dans la mesure où il apporte une preuve incontestable du fait que Raoul Follereau fréquentait plus qu’assidûment les groupuscules antisémites d'extrême droite de la France des années trente.

 

Afin de bien en saisir la portée, examinons-en chacune des informations.

 

 

 

http://posterous.com/getfile/files.posterous.com/tristao/AXFQYfwEKV5Wh8rCwqc26xpHT3V8iwMZuvhj5WXSZDvvif0DTYBbcUwhMjv7/Blum_La_libre_parole_0000jp.jpg.scaled.500.jpg

 

Qu'est-ce que La Libre Parole ? Initialement, La Libre Parole (dont le sous-titre était La France aux Français) avait été fondée en 1892 par Édouard Drumont dont Charles Maurras disait « la formule nationaliste est ainsi née presque tout entière de lui (…) Daudet, Barrès, nous tous, avons commencé notre ouvrage dans sa lumière. ». Violemment antisémite, La Libre Parole s’illustra particulièrement lors de l’affaire Dreyfus.

 

Signalons à ce titre que Raoul Follereau est un fervent fidèle de Charles Maurras. Étienne Thévenin considère même que Charles Maurras peut être qualifié de "maître à penser" ou de "père spirituel" de Raoul Follereau (voir ici).

 

Drumont est également l’auteur de La France Juive, ouvrage publié en 1886 dans lequel il développe un antisémitisme ...

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/9c/18990910_Edouard_Drumont_and_Libre_Parole.jpg

- ... racial (opposition entre aryens et sémites),

- ... économique (selon l'auteur, la finance et le capitalisme sont aux mains des Juifs),

- ... et religieux (notion de "peuple déicide").


Plus tard, Drumont quitte La Libre Parole qui décline jusqu'à disparaître.

 

En 1930, c'est Henry Coston qui relance La Libre Parole qui devient l’organe de presse d’un parti politique fasciste, le Parti National Populaire. En 1935, il absorbe l’hebdomadaire Le Porc-Épic, d’où le nouveau titre La Libre Parole & Le Porc-Épic (Hebdomadaire) du scan.

 

Henry Coston est un journaliste d’extrême droite. Antisémite doctrinaire, il se réclame d’Édouard  Drumont. Candidait explicitement antisémite aux élections municipales de Paris de mai 1935 (quartier des Archives, 3ème arrondissement), il tentera, en vain, de se faire élire député d’Alger aux élections législatives d'avril 1936 sous l’étiquette « candidat anti-juif d’Union latine ».

 

Il convient de noter que le libellé candidat anti-juif d’Union latine n’est pas sans rappeler la Ligue d’Union Latine fondée par Raoul Follereau en 1927. Nous y reviendrons dans un article ultérieur qui est ici.

 

En juillet 1933, Henry Coston avait créé un groupuscule dont l'existence sera éphémère : les Francistes qui déclarent lutter "pour la protection de la Race et la défense de la civilisation aryano-chrétienne par une entente internationale avec tous les mouvements internationaux de même tendance".

 

En février 1934, Henry Coston écrivait dans La Libre Parole que le nazisme "est l'une des idées les plus florissantes qui soient de nos jours". Il voua une profonde admiration pour l'Allemagne hitlérienne. En mars 1934, Henry Coston se rendit en Allemagne à la rencontre de Julius Streicher, gauleiter de Franconie, futur condamné à mort au procès de Nuremberg de 1945. En échange de ses bons et loyaux services de propagande antisémite, La Libre Parole d'Henry Coston recevra, tout comme Le Réveil du Peuple de Jean Boissel ou Le Grand Occident de Lucien Pemjean, subsides et encouragements de la part du Weltdienst, le centre de propagande nazi basé à Erfurt dont Henry Coston était le correspondant français dès 1934.

 

C'est aussi dans ces années-là qu'Henry Coston fait paraître en France plusieurs "éditions populaires" du faux antisémite qui inspirera Hitler : Les Protocoles des Sages de Sion.


Après la défaite de 1940, Henry Coston s’investit activement dans la politique de collaboration sous diverses formes : vice-président de l’Association des journalistes anti-juifs, secrétaire de rédaction du quotidien collaborationniste La France au travail, membre du Parti National-Socialiste Français, etc Il sera décoré de l’ordre de la francisque en 1943 (autre lien documenté sur Henry Coston).

 

*   *   *


Il ressort de la deuxième de couverture (ici) que La Libre Parole & Le Porc-Épic est éditée par le Centre de Documentation et de Propagande. Quel est ce centre ?

 

Dans son livre L'antisémitisme en France dans l'entre-deux-guerres: prélude à Vichy (disponible ici sur Google Livres), Ralph Schor apporte les informations suivantes : « Le centre de documentation et de propagande créé au début de 1936 par Henry-Robert Petit, imprima de nombreux documents dans lesquels les Juifs étaient attaqués sous les formes les plus diverses (…) dans la seule année 1936 un total de 1.800.000 tracts, 425.000 papillons antisémites, 95.000 livres et brochures. En 1938, le catalogue (…) comprenait quarante-sept ouvrages signés par quelques-uns des théoriciens les plus connus de l’antisémitisme ».

 

Henry-Robert Petit fut, tout comme Henry Coston, candidat anti-juif d'union latine aux élections de 1936 avant de devenir secrétaire général du Comité anti-juif de France de Louis Darquier de Pellepoix (nous en reparlerons ci-dessous).

 

*   *   *

 

 

S'en suit dans les deux pages suivantes (ici et ici) un édito dans lequel prolifèrent, jusqu'à la nausée, d'immondes injures, racistes ou non :

- « des ignorants, des cuistres, des Maçons » ;

- « minus habens » (expression latine signifiant familièrement personne aux facultés intellectuelles déficientes ) ;

- « crétin » ;

- « vieille barbe qui n’est pas celle d’un crétin, mais d’une crapule » ;

- « nègre blanc » (expression qui désigne une personnage de race apparemment blanche mais qui a du sang "de couleur" dans les veines) ;

- « avocat marron » (expression dont le sens nous échappe mais que nous imaginons peu flatteuse) ;

- « peuplade » (terme péjoratif pour désigner ce qui ne mérite pas d'être appelé "peuple")

- « barbare et esclavagistes » ;

- « un traître et un assassin » ;

- « esthète décadent, juif, maçon et marxiste : Léon Blum » ;

- « Cet Oriental » (Léon Blum est né à Paris en 1872 ... ce terme vise donc à nouveau sa judaïté) ;

- « amateur de vaisselle et de princesses » (allusion dont le sens m'échappe) ;

- « tiré, par les pattes, hors de son carrosse » (terminologie animalière pour parler d'un individu) ;

- « profil de vieille jument sémitique » ;

- « client de maisons closes » ;

- « ancien Satrape » (autocrate fortuné) ;

- « responsable de l'assassinat de … » ;

- « cortège de chienlit, précurseur de Mardi Gras » ;

- « crâne orné de quelques pansements » (utilisation d'un mot à consonance positive dans un but ironique).

 

*   *   *


Page suivante (ici), un nouveau nom apparaît comme président d'honneur : Jean Drault. Qui est-il ?

 

Auteur de textes antisémites, Jean Drault est collaborateur d'Édouard Drumont à La Libre Parole de 1892 à 1910, devient directeur de La France au Travail en 1940 et publie une Histoire de l'antisémitisme en 1941. Il accepte la direction du journal Au Pilori sur proposition des Allemands en 1943. Ce journal, financé par le IIIème Reich, mènera de nombreuses campagnes antisémites. Louis-Ferdinand Céline y publiera certains de ses textes. De faço plus générale, Jean Drault est l'un des principaux artisans, pendant les années trente, du "phénomène Drumont", oeuvrant sans relâche pour la réhabilitation de ce dernier.

 

En quelques phrases, cet appel résume la ligne rédactionnelle de ce journal et du Centre qui l'édite :

- "lutter contre la Judéo-Maçonnerie, le Marxisme et tous les agents de l'Anti-France" ;

- "débarrasser notre Pays de la puissance des Loges, du Ghetto et du Bolchevisme"

- "combattez pour une France nouvelle, libérée de l'emprise des internationale juive, maçonnique et marxiste".

 

*   *   *


Puis, le fascicule propose (ici) un croquis illustrant l'agression dont a été victime Léon Blum par les Camelots du Roi. Ici, un lien pour un information plus objective sur les faits qui se sont réellement déroulés.

 

*   *   *


Dans les deux pages suivantes (ici et ici), un autre rédacteur, Albert Monniot, décrit les faits à sa façon.

 

À propos de la contre-manifestation organisée par les mouvements anti-fascistes, il écrit : "Et la manifestation elle-même ? Des enfants et des femmes, les pauvres ! puis la masse des salopards et des chômeurs professionnels (...)

Paris n'est plus qu'une sentine impure,

Un égout sordide et boueux,

Où mille noirs courants de limon et de fange,

Viennent mêler leurs flots honteux.

Mais non, ce n'était pas là Paris : c'était l'Anti-France qui passait."

 

Nous retrouvons le terme d'Anti-France cher à Charles Maurras (voir ici). Rappelons que, à peine quelques mois plus tard, Raoul Follereau est décrit par un journal local d'Algérie française comme ayant "entrepris la grande croisade contre tout ce qui est Anti-France" (voir ici).

 

Mais revenons à ce Albert Monniot. Qui est-il ? Un journaliste antisémite qui fut proche de Drumont avant de l'être de Henry Coston. Il fut l'auteur d'ouvrages et d'articles au titre évocateur : Les Gouvernants contre la nation, La Boussole, comédie dramatique anti-maçonnique, ou encore Le Crime rituel chez les Juifs. Albert Monniot fait partie avec Jean Drault, Lucien Pemjean  et Urbain Gohier, de ces "fossiles" (c'est ainsi qu'ils se surnomment ironiquement entre eux) dont la prime jeunesse remonte aux grandes campagnes antisémites des années 1880, époque que Jean Drault qualifiait de "temps héroïques", et qui collaborent activement à La Libre Parole réssucitée par Henry Coston.

 

*   *   *

 


Les pages suivantes nous intéressent davantage car c'est ici que Raoul Follereau apparait.

 

http://posterous.com/getfile/files.posterous.com/tristao/9XJwZEPbzHwCzBbHc3FVhaobxgqXTzssExUXAqgjeuTUbrEv3XJbYaBOBMis/Blum_La_libre_parole_0008.jpg.scaled.500.jpg

 

Photo de Raoul Follereau qui a probablement servi pour le croquis ci-dessus.

http://blufiles.storage.live.com/y1pOGTQtLI8I4hBirE9GeGe3QcjcKjLQahRtFjqugGJ28EWQrfdtb294tN-1Uo6e_y8faXXzqFtB3M

 

http://posterous.com/getfile/files.posterous.com/tristao/1bQ2aZXd8mgTVDZzfiTtcHhjwyggGLderGsMfu83qV594e2W7kSAEY24PjdF/Blum_La_libre_parole_0009.jpg.scaled.500.jpg


Ces pages sont consacrées au bilan d'une réunion de propagande, le 10 février 1936, à laquelle Raoul Follereau non seulement a assisté, mais, pire encore, il a participé en qualité de conférencier. Dans le compte-rendu qui en est dressé, il est indiqué :

 

"Raoul Follereau, président de l’Union Latine, mit son ardent talent à démasquer les machinations maçonniques dans le drame de Marseille qui coûta la vie à l’infortuné Roi de Yougoslavie. Son argumentation brillante fit une impression profonde sur l’assistance et c’est au milieu d’applaudissements répétés qu’il termina son implacable réquisitoire.

 

De même qu'il nous a semblé intéressant d'identifier les différents pamphlétaires et rédacteurs de ce numéro de La Libre Parole, il nous semble utile de détailler quels furent les autres intervenants à cette "réunion de propagande".

 

Lors de cette réunion, Raoul Follereau fut précédé par le Comte A. de Puységur, Président de la Ligue Nationale Anti-Maçonnique. Il sera l'auteur, en 1944, d'un ouvrage aux convictions largement antirépublicaines intitulé  Les Sangsues de Marianne - Nos Parlementaires. Armand de Chastenet de Puységur sera condamné à mort pour "intelligence avec l'ennemi" à la fin de l'année 1944. Il sera un des rares écrivains qui ne verront pas leur peine communée en réclusion à perpétuité et sera donc exécuté (voir le doc ici, page 63 du doc mais page 67 du PDF).

 

Puis, messieurs Petit et Coston, dont la biographie a déjé été mentionnée ci-dessus, intervinrent.

 

Après Raoul Follereau, ce fut le tour de René Barthélémy. Francis Koerner cite René Barthélémy en qualité de chef national participant au déchaînement antisémite en Oranie (ici). En outre, son sujet d'intervention, lui, est clairement identifiable: le discours du rabbin Reichhorn est une invention allemande datant de 1868 qui alimente le fantasme du complot juif. Une sorte d'ouvrage précurseur des Protocoles des Sages de Sion.

 

Quant au livre Le Drame maçonnique. Le Pouvoir occulte contre la France, également cité par René Barthélémy, il s'agit d'un livre écrit par Paul Copin-Albancelli, ancien franc-maçon devenu proche de l'Action Française de Charles Maurras.

 

Puis intervint Jacques Ditte pour dénoncer la guerre civile et étrangère "préparées par les loges". En juillet 1937, Jacques Ditte participera, sous la présidence de la veuve de Drumont et avec Jean Drault et Lucien Pemjean dont nous avons déjà parlé ci-dessus, à la création de la Ligue Antijuive Universelle.

 

 Ralph Schor parle de Jacques Ditte dans son livre L'antisémitisme en France dans l'entre-deux-guerres: prélude à Vichy (voir ici) : "D'autres antisémites admettaient que Les Protocoles était peut-être un faux, mais ils se dépêchaient d'ajouter que le débat n'avait aucune importance : en effet, que ce livre fut authentique ou non, assurait Jacques Ditte, il présentait en traits véridiques les grandes lignes de ce plan de domination universelle d'Israël". Il cite également un autre passage : "Selon Jacques Ditte, de l'Ami du Peuple, auteur d'une formule souvent reprise, le monde était dominé par la finance judéo-germano-américaine".


Sur Google Livres, nous trouvons un ouvrage de Ariane Chebel d'Appollonia intitulé Extrême droite en France, Volume 1 dans lequel l'auteur affirme : "Les professionnels de l'antisémitisme et les phobiques du complot judéo-maçonnique n'auront pas non plus à se faire violence pour approuver les obsessions hitlériennes et Jean Boissel, Jacques Ditte et Louis Darquier de Pellepoix contribueront, chacun à leur manière, à la traque des Juifs".

 

Habile transition car la réunion de propagande du 10 février 1936 s'achève par l'intervention, justement, de Louis Darquier de Pellepoix. Quelques semaines plus tard, Louis Darquier de Pellepoix fondera son propre parti, le Rassemblement anti-juif de France. En 1937 et 1938, il suggérera au Conseil Municipal de Paris, dont il est membre, d'attribuer le nom d'Édouard Drumont à une rue de la capitale. Par alleurs, il réclamera la dénaturalisation de tous les juifs devenus français après 1918 et se réjouira de la Nuit de Cristal, le 9 novembre 1938 en Allemagne, qui vit des milliers de Juifs allemands dépossédés, battus, déportés voire même immédiatement assassinés. En 1942, il est imposé à Pétain par les Allemands en qualité de commissaire général aux questions juives en remplacement de Xavier Vallat, jugé trop peu germanophile.

 

*   *   *


Dans les deux pages suivantes (ici et ici), un texte de Henry-Robert Petit qui présente moins d'intérêt pour nous aujourd'hui. Il aborde le thème des nationalisations des sociétés d'assurance mais il fait de trop nombreuses allusions à des actualités de l'époque pour que son sens soit limpide aujourd'hui.

 

*   *   *


Aux pages numérotées 11 et 12 (ici et ici), un dénommé François Barthe donne à lire un troisième commentaire sur l'agression dont a été victime Léon Blum lors des obsèques de Jacques Bainville.

 

Si le propos parait plus policé que l'Edito, le fond reste profondément antisémite :

- "(...) deux choses particulièrement effrayantes (...) c'est l'enjuivement de la grande presse (...)" ;

- enfin, il exprime très clairement les futures justifications des lois antijuives que le régime de Pétain adoptera dès octobre 1940 : "Actuellement, les Français sont colonisés pacifiquement dans tous les domaines. L'économie, les rouages essentiels de l'État, la presse, les professions libérales, en un mot tous les secteurs importants de l'activité nationale sont envahis par les Juifs. Avec ténacité et patience, le Juif s'installe partout."

 

*   *   *


Page suivante, un article intitulé "Le Plan Diabolique" écrit par Saint-Claire (ici, ici et ici).

Nous n'avons pas retrouvé d'éléments d'informations pertinents sur cet auteur qui est sans doute un pseudonyme.

 

Cependant, certains extraits méritent d'être cités :

- "il est démontré, avec ou sans Les Protocoles que la Maçonnerie est l'instrument, conscient ou inconscient des juifs qui trouvent dans cette association "discrète" le refuge idéal pour préparer, sur terre, le royaume promis par Jéhovah au patriarche Abraham" ;

- la Société des nations y est qualifiée de "Convent Maçonnique International, permanent, public et despotique" ;

- "le courage consiste, non à se faire tuer dans un acte de sublime folie, mais à vivre, mais à lutter sauvagement, cyniquement, par tous les moyens (en italique dans le texte d'origine), contre une secte infâme et contre un race maudite qui voudrait trouver en la Chrétienté, en la France surtout, fille aînée de l'Eglise, un nouveau Christ à crucifier".

 

*   *   *


En page suivante, un autre article de Henry-Robert Petit commence fort (ici, ici et ici). Sous le titre Les Juifs et leurs crimes, il donne immédiatement le ton "il est indispensable de connaître la malfaisance de la race maudite dans les temps contemporains". Et, pendant deux pages et demi, l'auteur dénonce ces "immondes youpins, venus de tous les ghettos d'Europe, lesquels attendent avec impatience l'heure de la curée qui doit livrer notre beau Pays, comme la malheureuse Russie, à leur rapacité".

 

Et il achève son pamphlet de façon prémonitoire, surtout lorsqu'on sait qu'il participera activement à la propagande nazie pendant la seconde guerre : "Si Révolution fut jamais nécessaire, c'est bien celle qui devra demain nous débarrasser pour toujours de la juiverie infecte qui entrave la vitalité de notre Pays.

Cette Révolution, bien française, explosion d'un légitime écoeurement, d'un compréhensible dégoût, d'une nécessaire mesure de rénovation, si sanguinaire soit-elle, ne pourra jamais venger la multitude de chrétiens massacrés par la race maudite." (la mise en caractères gras est de nous).

Tout cela pour "revoir une vraie France, immortelle, respectée et honorée (...) pour sauver notre civilisation de l'avilissement, de la décadence et de l'anéantissement".

 

*   *   *


Nous poursuivons notre lecture de ce numéro 5 de La Libre Parole par la rubrique Faits et Documents, sorte de patchwork composé d'anecdotes d'actualité et de courrier des lecteurs (en vrac, les pages 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26)

 

Nous y trouvons un certain nombre de propos qui méritent d'être relevés :

 

- page numérotée 21 : "nous avons dit et nous répétons : que les Juifs appartiennent à une race différente de la nôtre et qu'ils ne sont pas français ; qu'ils poursuivent depuis des siècles le dessein de courber le monde sous leur joug ; que, pour ce faire, ils emploient tous les moyens propres à diviser et à démoraliser les autres peuples ; que leur principale arme est la société secrète dont la Franc-Maçonnerie est le prototype ; (...)"

 

- Page numérotée 22, même Jacques Bainville, pourtant écrivain et journaliste de droite, tendance Maurras, n'a pas grâce aux yeux des auteur de ce torchon : "(...) il était loin d'avoir notre sympathie (...) l'amitié que lui portait un certain nombre de personnalités juives et maçonniques et sa collaboration aux journaux du Juif Perquel et de la juive Brawn femme Dupuy le rendaient suspect à bien des patriotes clairvoyants".

 

*   *   *


Les pages suivantes n'apportent que peu d'éléments nouveaux par rapport à ce que nous savons déjà. Nous noterons juste une critique littéraire d'un livre pro-allemand préconisant le rapprochement de la France d'avec les dictatures fascistes allemandes et italiennes (27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34).

 

 


 Qu'en est-il de Raoul Follereau dans tout cela ?

 


Dans un article précédent, nous avons déjà exposé l'attachement de Raoul Follereau pour le régime fasciste italien de Mussolini malgré :

- les conditions de sa prise de pouvoir,

- les dérives dictatoriales,

- les exactions commises tant sur le territoire national italien qu'en Libye ou en éthiopie,

- etc.


Nous avons également décrit les affinités de Raoul Follereau avec Charles Maurras (ici) ou avec le régime de Vichy (ici).

 

Ce numéro 5 de La Libre Parole démontre malheureusement, et de façon incontestable, la proximité de Raoul Follereau avec les pires éléments de l'antisémitisme radical.

 

Cette proximité n'est ni ponctuelle ni fortuite : Raoul Follereau n'a pas fait qu'assister à cette réunion, il y est intervenu, de façon officielle, en qualité de président de la Ligue d'Union Latine. Union latine au nom de laquelle deux ténors de l'antisémitisme - Henri Coston et Henri-Robert Petit - se présenteront aux élections législatives en qualité de candidat anti-juif d'union latine (voir ici).

 

Nous avons déjà vu (ici) que Raoul Follereau s'est déjà fait ou se fera l'auteur, à son tour, de propos ouvertement antisémites. C'est donc une véritable proximité idéologique autour du complot maçonnico-judéo-bolchevique qui réunit ces tristes sires.

 

Il est bien entendu difficile de rechercher des documents, tracts ou prospectus relatifs à une inclinaison politique que bien des personnes ont intérêt, aujourd'hui, à cacher. Nous sommes donc intéressés par toute information fiable relative à Raoul Follereau et à sa Fondation.

 

 

 

Pour être sûr de lire la dernière version de cet article, consulter notre blog ici.

http://follereau-entre-ombre-et-lumiere.over-blog.com/ 

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16 avril 2010 5 16 /04 /avril /2010 17:52

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 

 

Dans ce premier article, nous allons exposer dans quelle mesure Raoul Follereau fut un partisan fidèle et dévoué du régime fasciste italien de Benito Mussolini.


Cependant, afin de bien comprendre la portée des choix de Raoul Follereau, il nous faut rappeler brièvement quelques événements historiques.

 

 

Rappels historiques

 

 


Benito Mussolini est né le 29 juillet 1883 en Italie. Initialement membre du parti socialiste italien, il en est exclu fin 1914 et lance alors un journal « Il popolo d’Italia » (Le Peuple d’Italie) dans lequel il adopte des positions nationalistes.


Le 23 mars 1919, Mussolini crée les Faisceaux italiens de combat, mouvement politique semi-militarisé, dont le programme est constitué d’un mélange de réformes politiques et sociales de type progressistes et de revendications nationalistes.http://lewebpedagogique.com/histoireauroussay/files/2008/10/250px-czarne_koszule.png


Le 7 novembre 1921, le mouvement se transforme en Parti National Fasciste et se présente au pays avec un programme politique nationaliste, autoritaire, antisocialiste et antisyndical.


Les mots se conjuguent avec la violence : les fascistes italiens sont responsables de nombreuses agressions tant verbales que physiques à l’encontre de leurs adversaires.


Fin octobre 1922, après plusieurs mois de combats armés dans toute l’Italie couronnés par la Marche sur Rome des chemises noires, le roi Victor-Emmanuel III confie à Mussolini la charge d’un nouveau gouvernement.

 

Les violences se poursuivent et s'amplifient. En janvier 1923, le Grand Conseil du Fascisme décide la création de la Milice Volontaire pour la Sécurité Nationale. Ratonnades, incendies, et ingurgitation forcée de ricin deviennent des méthodes habituelles d'intimidation.

 

En janvier 1925, Mussolini assume publiquement l’assassinat du député Giacomo Matteoti qui avait dénoncé le climat de violence, d’intimidation ainsi que le nombre de malversations au cours des élections d’avril 1924.

 

Le régime bascule alors clairement sous la forme dictatoriale :  

 

- mise sous contrôle étatique de la presse, suppression des journaux d'opposition ;  

- prohibition du droit de grève, interdiction des syndicats autres que ceux officiellement reconnus par l’État ;  

- attribution à Mussolini de prérogatives législatives en plus de ses pouvoirs exécutifs ; le rôle du Parlement s’estompe au profit du Grand Conseil du Fascisme présidé par Mussolini ;  

- interdiction des partis autres que le Parti National Fasciste ;

- les élections se transforment en plébiscite d'une liste unique et non modifiable de 400 candidats choisis par le Grand Conseil du Fascisme ;  

- les conseils municipaux ne sont plus élus, mais nommés ;  

- etc.


Initialement, la dictature fasciste italienne ne présentait aucun signe d'antisémitisme. En revanche, à compter des lois raciales de 1938, un antisémitisme légal fut mis en œuvre : recensement, exclusion de certaines professions, etc. Néanmoins, l'antisémitisme italien n'atteindra pas la frénésie de l'antisémitisme nazi.



Dans ce contexte, qu'en est-il de Raoul Follereau ?

 

http://blufiles.storage.live.com/y1pOGTQtLI8I4hBirE9GeGe3QcjcKjLQahRtFjqugGJ28EWQrfdtb294tN-1Uo6e_y8faXXzqFtB3MA l'époque des années 1920, Raoul Follereau (voir photographie de gauche) n'est pas encore devenu l'apôtre des lépreux. Ses actions en faveur des lépreux ne commenceront qu'au milieu de la seconde guerre mondiale (voir une biographie de Raoul Follereau ici).

 

En 1925, Raoul Follereau a 22 ans. Deux ans plus tard, il fonde la Ligue d'Union Latine sur laquelle nous avons rédigé un article spécifique (ici et ici).

 

Selon Étienne Thévenin, un de ses biographes, Raoul Follereau est séduit dès la fin des années 20 par l'Italie fasciste (Étienne Thévenin, Raoul Follereau, hier et aujourd'hui, Éditions Fayard, 1992, p.68).


http://kidslink.bo.cnr.it/besta/lavoro/velocita/marinett.jpgEn 1926, il rencontre personnellement Mussolini (ibid p.124). A compter de cette date, Raoul Follereau passe régulièrement la semaine de Pâques à Rome avec certains membres de la ligue (ibid p.69). En mars 1930, Raoul Follereau et ses ligueurs sont très officiellement reçus au Cercle artistique de Rome par un dénommé Marinetti (voir photographie de droite) (ibid p.69). Filippo Tommaso Marinetti était un écrivain italien de la mouvance futuriste. Il faisait partie des 119 arditi qui fondèrent, autour de Mussolini, les Faisceaux Italiens de Combat, le 23 mars 1919 (qui deviendra, deux ans plus tard, le Parti National Fasciste, cf. indications historiques ci-dessus).


http://static.flickr.com/121/284319947_5a55e9730c_m.jpgDans son bulletin d'avril 1932, Raoul Follereau exprime son admiration, son amour, son ravissement et sa reconnaissance pour l'Italie fasciste de Mussolini :

 

"le fascisme est un phénomène italien, d'ordre purement italien et qui ne nous regarde en aucune manière. Nous ne devons pas nous mêler de la politique intérieure de ce pays, pas plus que nous ne saurons admettre qu'un Italien fit de la propagande pour tel ou tel de nos partis. Ceci dit, qui nous empêchera d'admirer l'Italie autant qu'elle le mérite et de l'aimer selon notre cœur ? Qui nous empêchera d'être ravis de sa renaissance et reconnaissants de sa victoire qui n'a peut-être pas seulement sauvé cette nation du bolchevisme mais un peu aussi toute la civilisation latine." (ibid p.68)


Peu après, l'Europe occidentale subit les crises diplomatiques de l'avant-guerre. En juillet 1934, Hitler fait assassiner le chancelier autrichien Dolfuss et tente d'annexer l'Autriche. Mussolini envoie alors une partie de son armée à la frontière italo-autrichienne pour empêcher Hitler de mettre son projet à exécution. Profondément germanophobe, Raoul Follereau engage alors sa Ligue d'Union Latine dans une vaste campagne en faveur d'un rapprochement entre la France et le régime fasciste italien. En effet, Raoul Follereau reconnait dans l'Italie fasciste de Mussolini le socle d'une civilisation commune avec la France (ibid p.126).

 

De fait, lors de l'invasion, en 1935, de l'Éthiopie par les armées du Duce, Raoul Follereau prend fait et cause pour le dictateur italien et lance des pétitions pour que ni la France ni la Société des Nations ne prennent de sanctions contre l'Italie (ibid p. 101). L'Éthiopie était, à l'époque, un des derniers pays africain non colonisés (sinon le dernier) et, qui plus est, membre de cette même Société des Nations.

 

Plus d'infos sur la seconde guerre italo-éthiopienne (1935/1936) :

L'énergie déployée par Raoul Follereau au service de cette cause fut "considérable", selon Thévenin (ibid p.124). Dans son numéro de janvier 1936, Raoul Follereau dénonce la Société des Nations comme un "monstre à fabriquer la guerre" aux mains des francs-maçons. Afin de justifier sa position, Raoul Follereau reprend à son compte la dimension soit-disant humaniste des aventures coloniales : l'intervention italienne permettrait, selon lui, de libérer deux millions d'esclaves de l'empire éthiopien de Hailé Sélassié et d'en soigner les populations. Il réitère sa conviction que Mussolini est victime d'un complot de la presse, de la Société des Nations et de la franc-maçonnerie (ibid p.125).


http://idata.over-blog.com/1/80/87/99/Assez.jpgOuvrons une parenthèse pour souligner cette
rhétorique anti-maçonne que nous retrouvons sous la plume de Raoul Follereau. Elle est habituelle pour l'extrême droite française de l'époque aux yeux de laquelle la franc-maçonnerie incarne l'Anti-France, au même titre que le parlementarisme, le bolchevisme ou le judaïsme. Raoul Follereau adhère à cette idéologie et y participe activement. Nous aurons l'occasion d'y revenir plus en détail ici, ici ou ici. Fermons la parenthèse.

 

Prolixe pour vanter les mérites de Mussolini, Raoul Follereau ne soufflera mot des massacres commis par l'armée italienne dans la population éthiopienne, y compris à l'aide d'armes chimiques dont l'usage est pourtant prohibé par les conventions internationales.


Cette "mussoliniphilie" porte ses fruits : Raoul Follereau rencontre à nouveau Mussolini le 2 janvier 1936 et ressort subjugué de l'entretien. "Je l'admire" confie-t-il. En avril 1936, il reçoit la médaille de vermeil de la cause franco-italienne. Et, le 3 mai 1936, Raoul Follereau reçoit des main du Duce  ... une photo dédicacée. Raoul Follereau deviendra alors assez proche du régime fasciste italien pour être invités à divers événements officiels au cours de l'été 1936 (ibid p.126).

 

Cette année 1936 correspond également aux preuves que nous avons dénichées démontrant l'antisémitisme actif de Raoul Follereau (ici, ici et ici).

 

Thévenin ne s'étend pas sur la suite des relations entre Raoul Follereau et le Duce (ibid p.127). Pourtant, l'actualité internationale en général et les relations franco-italiennes en particulier ne manquent pas de rebondissements :  

 

- en 1938, le Duce adopte des lois anti-juives, sans que l'Allemagne le lui ait demandé et alors que les juifs italiens bénéficiaient jusqu'à lors d'une exceptionnelle intégration, y compris au sein même du Parti National Fasciste ;

- en novembre 1938, Mussolini réclame à la France la restitution de la Savoie, de la Corse et de Nice ;

- le 10 juin 1940, alors que les armées françaises s'effondrent sous les coups de butoir de la Blitzkrieg de la Wehrmacht, Mussolini déclare - courageusement - la guerre à la France : l'amitié latine dont Raoul Follereau se prévalait a vécu ;

- etc.

 

À notre connaissance, même plusieurs années après la fin de la seconde guerre mondiale, Raoul Follereau n'a jamais exprimé ni regrets, ni remords, pour son soutien actif et délibéré au régime fasciste italien. Et pour cause : Raoul Follereau restera toute sa vie un fidèle du Maréchal Pétain (ici) et de Charles Maurras (ici).

 

 

Autres liens internet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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15 avril 2010 4 15 /04 /avril /2010 15:00

 

Message 20 janvier 2011

Retrouvez cet article mis à jour dans notre livre PDF gratuit.

 

 

 

http://webplaza.pt.lu/ffl/images/RF028.jpgRaoul Follereau, convenons-en, a profondément marqué son époque.

 

Orateur de talent, son investissement au profit des lépreux a permis, en Afrique et ailleurs, de faire avancer leur cause.

 

Auteur de multiples ouvrages ("Donnez-moi deux bombardiers" "30 fois le tour du monde", "Une bataille pas comme les autres", etc.), Raoul Follereau a contribué à éveiller les consciences occidentales aux drames qui frappent l'humanité.

 

Les immenses mérites du travail produit par Raoul Follereau, puis par la Fondation Raoul Follereau, ne sont donc pas en cause.

 

Pour autant, faut-il fermer les yeux sur certains aspects de la vie de Raoul Follereau et de la Fondation Raoul Follereau ? En ce qui nous concernent, nous ne pensons pas que les aspects a priori positifs de la vie et de l'œuvre de Raoul Follereau empêchent, de facto, une analyse impartiale et objective.

 

A l'heure où cette dernière entreprend de faire reconnaître la sainteté de Raoul et Madeleine Follereau, le devoir de transparence et de vérité s'impose. Telle est l'ambition de ce blog.

 

 

Source : Annonce légale de la création du "Mouvement pour la glorification de Raoul et Madeleine Follereau" (publication du 27/06/2009, disponible ici). L'objet social de cette association loi 1901 est de "promouvoir et donner en exemple la vie, l’oeuvre et la pensée de Raoul et Madeleine Follereau, afin de favoriser la mise en oeuvre concrète de ces actions dans les oeuvres caritatives de bienfaisance et d’assistance, dont ils ont suscité la création, directement ou indirectement ; à cet effet, elle entreprendra notamment les démarches nécessaires à l’ouverture d’une enquête en vue d’une procédure en canonisation de Raoul et Madeleine Follereau".

 

 

 

 

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